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 All this time wasted and all this time gone

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Ce soir, il rêve de prison.
De barreau le séparant du ciel.

Un souffle loupé et Lope se réveille, la cage thoracique douloureuse, son cœur battant contre comme voulant la briser et s’en libérer. Son lit lui semble trop chaud, trop étouffant ; sa couette d’habitude si douce, l'enserre comme un python, l'étreignant  dans ses anneaux. Le cauchemar continue de l’enlacer avec presque tendresse et la chimère se retrouve à suffoquer, à se débattre pour finalement tomber contre le sol, à peine amortie par ses couvertures. Il se redresse, donne des coups de pied griffus à sa geôlière avant de s’en défaire et de s'effondrer, recroquevillé, quelque pas plus loin. Les mains plantées dans les cheveux, il gémit, il a l’impression que toutes ses blessures passées le brûlent pour se rappeler à son présent.

La chimère gémit. Pour lui-même, pour son lui passé. Il lui faut un temps pour que les sensations qui furent, confrontée à celle présente, s'affrontent et qu’il ne démêle le vrai du faux.
Son dos le fait-il souffrir ?
Non, non. Il ne sent que la fraîcheur du parquet lui caresser les jambes.
Est-il emprisonné ?
Non, sa fenêtre ne comporte nul barreau, il voit la lune qui lui sourit.
Le passé est révolu, il s’en est enfui pour courir dans un présent heureux avec Wolpertinger.

Plusieurs fois, il doit se le répéter avant que la phrase ne soit acceptée.

Alors, Lope est là, las et fatigué et tremblant, dans sa chambre, après une nouvelle journée à arnaquer un alice. Celui-ci, a-t-il appris en farfouillant ses souvenirs, à fait de la prison. Il a vécu dans un cachot, légalement construit par les alices. Quelle absurdité. Quand il lui a été donné de choisir entre l’offre du passeur -être libre dans les otherlands- ou passer ce qui lui restait d’éternité dans une cage, l’homme n’a même pas réfléchi et à suivit le lapin. Ce n’était que pour trouver une nouvelle geôle, enfermé dans un monde fou où il était loin des siens. L’homme a voulu retrouver sa patrie et a accordé une nouvelle fois sa confiance à qui il n’aurait pas fallu. Les deux chimères ont exécuté leurs plans à merveille, tant d’argent contre un rêve cauchemardesque, un patchwork de souvenir et au final, un retour à une case départ… et même pas celle souhaitée.

Bah ! Il n’avait qu’à pas être aussi crédule s’était rassuré Jackalope, l’estomac twisté par un sentiment dérangeant.
Il avait détourné les yeux quand l’homme les avait regardés avec supplice.
Il l’avait mis hors de la Galerie des Glaces quand l’homme avait confusément reconnu qu’il n’était pas chez lui.

Infailliblement, plus tard, tout ce mensonge construit ferait sens dans la tête de la victime, c’était une arnaque qui durait depuis des années et qui à présent était bien huilée. Mais Lope en ressentait ce soir un contre-coup. Un sentiment bouleversant sa sérénité, un qu’il ne voulait pas nommer, des souvenirs qui se mêlaient aux siens. Il refusait ce qu’il ressentait. Il voyait…
Une prison. Une cage.
Comment en sortir ?
Saisir sa liberté.
Une clef. Un lapin. Une panthère…

L’écho était trop fort pour être ignoré, il était torture. Les yeux serrés clots, les deux souvenirs se mélangeaient dans sa tête, le rendait fiévreux, des gouttes de sueurs perlant sur son front. Non, pas deux et c’était bien là le problème. C’était trois souvenirs qui lui donnaient mal à la tête. Un souvenir lointain, presque étranger, arraché à une boule de neige si légère. À ce qu’il pensait être son premier ami avant que la réalité ne le gifle de sa cruelle vérité. Son premier ami était un alice et sa générosité et douceur et innocence remettait en cause tout ce en quoi Lope croyait, tout ce qu’il s’était construit pour justifier son triste passé. La chimère ne voulait pas de moralité grise. Il voulait du noir et blanc, du simple, il voulait justifier toute sa vie car les alices étaient des créatures cruelles qui ne pensait qu’à faire du mal à lui et aux autres. Quoi de plus naturel que de leur rendre alors la pareille ? Mais celui-là remettait tout en cause. Quatre ans déjà et ce sentiment n’arrivait à disparaitre que le temps qu’il s'occupe d'autre choses. Fugacement. Car toujours, il revenait. Et la chimère l’avait, sur le bout de la langue, il pouvait le nommer, mais Jackalope refusait. Alors, il allait se confronter à ce passé et confirmer tout ce en quoi il croyait s’est-il résolu ce soir-là.

Instinctivement, ignorant son mal-être, Lope s’était levé et avait passé des vêtements écrus et ternes, un pantalon de toile léger, des bottes montantes aux genoux, une tunique simple mais confortable et une petite cape avec capuche. Ça ne servirait à rien, ses bois duveteux étaient trop longs pour être dissimulés, mais qu’importe. Dans Underlands, il allait ignorer les regards. Il en avait l’habitude. Et il allait chercher et confronter. Ça aussi, il en avait l’expérience.

Très à prévoir, ce premier soir, Jackalope ne le trouva pas. Il rentra bredouille. Alors, il revient un second soir, un troisième soir… Petit à petit, il utilisa ses capacités et chercha une tête aux cheveux blanc, fillant comme une étoiles dans un coin sombre d’obscurité d’un souvenir. Il s’est demandé parfois s’il n’était pas trop tard, si cette enfant sauvage n’avait pas trouvé une trop prévisible fin. En cette énième soirée à chercher, l’estomac encore twisté par ce sentiment qu’il ignorait, Jackalope soupira, assis à même le sol, la main agrippée aux vêtements cachant son ventre. Il fallait peut-être se rendre à l’évidence. Chercher une personne, dans tout un monde, était une cause perdue. Un putain de miracle qu’il a pu faire une fois Avec Wopeltinger. Et pourtant, en ce énième soir à chercher, quand il commençait à se résoudre à abandonner…

Étrangement, se détachant de la saleté des lieux par la pureté de ses cheveux, il était là et sans surprise, l’estomac de la chimère se twistait davantage à cause de ce sentiment qu’il pouvait presque nommer à présent. Leurs séparation avait été aussi brève que violente, le rejet dont avait fait preuve Jackalope l’avait meurtri autant qu’il avait pu blesser l’alice. Le voilà, ce sentiment qu’il ressentait, quelque chose qui avait toujours été là mais qu’il avait ignoré jusqu’à présent, comme une première lettre d’un paragraphe dont tout le monde se fiche. Son visage se froisse, mille émotions passent dessus alors que sa voix se fait petite et cassée: “Oh. Te voilà enfin.” Il soupire, comme soulagé, puis détourne le regard, boudeur. “Dandelion.” Et maintenant ? Jackalope n’en a pas la moindre idée…
Quelque part en 591 Ap.A
Dandelion
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Citation : forth from its sunny nook of shelter’d grass — innocent, golden, calm as the dawn
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Origine : Monde réel [fiction]
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Dandelion
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Aujourd’hui, cela fait un an.
Un an jour pour jour depuis ta fuite, ton échappée laide loin de ce bordel qui n’avait pourtant jamais été tel à tes yeux. Pour ta frimousse d’enfant, depuis toujours, ce n’est qu’une maison. La seule que tu aies eue oncques. Un navire éventré, pas de quoi dépareiller dans le paysage de l’Atlantide, une sorte de trois-mâts moins fin qu’un oiseau, le genre balourd, renversé là comme si la houle l’y avait précipité ainsi que sur un récif plat, dont les vieilles voiles avaient été teintes à l’indigo afin de servir de rideaux que l’on aperçoit pendre défraîchis derrière les vitres aux croisillons sombres de crasse. Dans le crépuscule languide, des lumières s’y allument à l’instar de fantômes jaunis, falots fanaux dessinant des silhouettes à travers les carreaux de verre. De là où tu t’es posté, tu ne peux reconnaître quiconque. Tu aimerais, pourtant. Espères. Quelle félicité ce serait que de discerner un faciès familier, les boucles poivre et sel de Lavande ou le nez trop pointu de Pivoine, le giron de Jasmin — si ample que tu ne peux en faire le tour avec les bras — ou les gesticulations de Lilas, et c’est vrai que tu donnerais n’importe quoi pour que l’une d’elles ouvre la porte bancale, presque concave, de la bâtisse, te remarque posté de l’autre côté de la rue et te fasse de grands signes d’entrer ou bien qu’elle se précipite vers toi en criant ton nom. Plus rien alors ne te retiendrait de lui courir dans les bras. Oh, que tu aimerais. Pourtant.
Tu as peur.
Peur que ce soit tout l’inverse. Non pas qu’aucune ne se rende compte de ta présence, de cette indifférence tu te contenteras, mais qu’elles te voient et, malgré cela, qu’elles choisissent de clore le battant de bois. Qu’elles referment le domicile où elles t’avaient accueilli comme elles refermeraient leur cœur, refusant de t’inviter à l’intérieur, de te pardonner. Rejetant jusqu’à ton existence même, en raison de la souffrance qu’elle leur avait causé. Tu peux supporter cette morsure au fond de ton estomac à la vision de ton ancien foyer, les crocs qui s’y étaient plantés jadis et qui reviennent ce soir-là déchirer les cicatrices qu’une année de vadrouille s’était évertuée à estomper ; tu peux endurer cette douleur vivace au creux de tes entrailles quand tu demeures planté dans l’ombre d’une arche, invisible, étranger à leur monde. Nostalgie. C’est elle, la hyène agriffée à ta mémoire. Elle ne t’a jamais lâchée. Même durant tes courses folles avec Renard, même sous le manteau d’Insomnia, même entre les branches du nid de Parthenópē — jamais la hyène n’a déserté. Tu t’en es accommodé. Mais que tes mères te repoussent et tes rotules tomberont en poussière, ton squelette se brisera sur place tandis qu’un à un tes muscles se déliteront en lambeaux de chagrin jusqu’à ce qu’il ne subsiste de ton corps qu’un petit monticule de larmes, un amas de gélatine mortifiée par la blessure de l’abandon.

C’est ce sentiment que tu fuis une nouvelle fois.
Te détournant de l’hôtel échoué où pénètrent les premiers clients de la soirée, tu rases les murs pour remonter la rue sous les halos balbutiant des becs-de-gaz, t’éloignes à petits pas muets de tes souvenirs qui cavalcadent à l’arrière de ton encéphale sans que tu ne leur aies rien demandé. Les lieux les convoquent à ton insu, chaque recoin alentour t’ayant vu grandir pendant plus de quatre ans alors, pour sûr, tu saurais retrouver la cachette où tu venais te dissimuler avec ton ami goupil, puis plus loin la vieille carriole sans roues qui te servait à grimper sur le toit du bâtiment attenant, ou la fine rigole dans laquelle tu avais trébuché et perdu la miche que tu transportais ; à l’époque ta honte s’était faite trop grande, aussi avais-tu préféré attendre deux jours dehors plutôt que d’avouer ta faute, avant que la faim ne te contraigne à revenir au bercail l’échine basse — le sang d’Amaryllis était alors d’une encre si épaisse qu’elle avait complètement oublié de te gronder. À l’aune de ces mille et une réminiscences, cette année d’exil ressemble à une journée. Tout ce que tu as vécu ici s’est déroulé hier, assurément, car tout est si cru, si vivide à ta mémoire. Tout est là, intact ou presque. Regarde.
Te souviens-tu ? À l’extrémité de cette ruelle, il avait trouvé refuge sous un auvent, recroquevillé au pied d’une pile de cageots. Il ne bougeait guère, son poitrail frémissant par à-coups, cheveux éparpillés autour de ce que tu avais d’abord pris pour des branches — de petits bois de chevreuil —, un brin plus vieux que toi, à peine, de sorte que tu t’étais approché, entre inquiétude et curiosité, tes bras de gamin grippés autour d'un paquet de courses. Un pas en avant.

Un pas en arrière. Tes jambes reculent d’instinct face à la silhouette dont tu as croisé le regard, à quelques mètres. Dans la pénombre, il se tient pareil à un ectoplasme, un spectre menaçant qui sans un mot te jette au visage les dernières secondes que vous avez partagées il y a un siècle, un mois, une heure. Lui qui t’exècre pour quelque chose que tu n’as jamais compris, faute de vous être expliqués depuis. Tu t’en es convaincu — il te déteste. T’abhorre depuis ce funeste jour où son regard sur toi s’est voilé d’horreur, de colère, de trahison. Et à cette image qui grince contre ta cervelle, tes yeux en retour te brûlent soudain, humides, se troublent quand ton museau se froisse, grimace, hoquète au tournevis qui tout à coup vrille aigu dans ton ventre. D’où jaillit ce mal si abrupt qu’il t’arrache un jappement ? Pourquoi maintenant, pourquoi aussi puissant ? Tu détales pour toute réponse, incapable de contrôler cette panique qui vient de te gifler. Les fantômes, il ne faut pas les garder près de soi.
On t’aura prévenu.
Invité
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Il ne sait pas quoi faire. Ni quoi dire. Sa bouche se tord de mécontentement et oscille comme une vague tumultueuse. Ses mains se crispent sur son vêtement et ses ongles, tels des griffes, percent la toile de sa tunique. Ses yeux se plissent jusqu’à n’être que deux fentes où dansent tout au plus quelque lumière à travers ses longs cils. Jackalope retient son souffle.

Et sa tête s'alourdit de mille questions.

Pourquoi revenir ? Pourquoi le voir ? Et maintenant ?
Pourquoi faut-il que ce soit un alice ?

Il entend un bruit et par réflexe, Lope rentre sa tête dans les épaules, prêt pour le coup à venir. Car c’est comme ça qu’il a l’habitude qu’on réagisse à sa présence. Il est petit et frêle et faible, il agace facilement par son comportement fier et sauvage alors on l'accueille de quelques coups pour le mettre à sa place. Quoi que. ça fait longtemps que ce n’est pas arrivé ? Il croit, peut-être. Revoir celui qui l’a trouvé dans le passé réveille à présent les instincts de survie qu’il avait développés dans cet horrible manoir et qu’il croyait oubliés.
Quand il lui avait fallu presque mourir de faim pour laisser quelqu’un l’approcher. Et cet étrange gamin qui lui témoigna de la gentilesse, Lope s’en était entiché.

Pourquoi faut-il que ce soir un alice ?

Jackalope attend le coup qui ne vient pas. Ses narines sifflent quand il laisse passer l’air qu’il retenait depuis si longtemps dans ses poumons. Il ose ouvrir timidement un oeil jaune pour voir… Personne.
Dandelion est partit.
La chimère pousse un hoquet de surprise et reste un instant interdite, peu habituée à faire fuir les gens. Quand il cherche querelles, d’habitude, querelle le trouve rapidement. Même quand il ne cherche pas spécialement, réalise-t-il doucement. Il attire les ennuis. Peut-être est-ce lui le problème.
Mais peut-être est-ce mieux ainsi.
Peut-être faut-il laisser les tristes fantômes de son passé en arrière et avancer vers un présent riant.
C’est pourquoi il ne comprend pas. Pourquoi hume-t-il l’air ? Pourquoi trouve-t-il la bride d’un souvenir qu’il lit, où il se voit au fond de la rue, ressent tant d’émotions contraire à ce qu’il devrait lire et qu'il voit. Une fuite par là. Jackalope suit.

Il court même.

Et il ne comprend pas pourquoi.
Pourquoi faut-il que ce soit un alice ?

Il se surprend même à user de son maigrelet souffle pour hurler “A-aattend, je veux… Je veux juste parler !

Vraiment ? Et pourquoi ?
Lope suit un instant, attrape les brides de souvenirs qui flottent encore et parvient à courser, tant bien que mal, sans pour autant rattraper. Dandelion lui échappe et avec, milles nouvelles questions naissent et ses chances de réponses meurent. Est-ce comme ça que tout va finir ? Hélas, Lope n’a jamais été aidé physiquement. Très vite à bout de souffle, il s’arrête, chancelle près d’un mur contre lequel il s’appuie avant de se laisser tomber à genoux.

S-S’il te plaît…

Il attrape la tête entre ses mains, comme pris de migraine et gémit. Tout est trop compliqué pour lui, il n’est qu’une simple créature, un mélange entre un lièvre et une antilope.

Alors pourquoi tout ça ? Pourquoi ses réactions, pourquoi ces actions ?
Pourquoi ce regret ?
Pourquoi la culpabilité.

Pourquoi fallait-il que ce soit un alice ?
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Dandelion
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Une fois encore, tu as réagi avant même de réfléchir — agi avant de fléchir.
Étire l’espace entre toi et ton souvenir, entre cette époque révolue qui t’avait vu naïf t’accroupir près de ce cadavre en sursis, ce corps fragile à demi mort que tes phalanges étaient venues frôler afin d’interroger sa condition. Il avait tout juste gémi, tu avais sursauté. Ta première rencontre avec une chimère. Tu t’en rappelles si distinctement, comme si c’était hier ; ses iris fiévreux, ses mimiques de chat sauvage mâtiné de faon esseulé, sa jolie voix aux cassures veloutées, puis ses doigts fins à la fois craintifs et avides de saisir la pomme que tu lui tendis. Avait-il peur de s’y empoisonner ? Tu n’avais pas saisi ses soupçons d’alors, n’avais rien fait pour le rassurer sinon rester là, à côté, trop innocent pour ne serait-ce que penser qu’il puisse se méfier d’un étranger. Sa main en suspension, l’espace d’une seconde. Un centimètre. Rien qu’un centimètre.

Et tu cours, Dandelion, à t’en fissurer les poumons, tu cours antilope sur les pavés de guingois, tout pour t’éloigner de ce souvenir qui s’est déjà agrippé à tes chevilles, bouscules le premier badaud surgi d’une ruelle perpendiculaire et récoltes sur-le-champ une claque sur la tempe « pour t’apprendre, tiens », ça ne te fait pas vraiment mal pourtant c’est assez pour t’immobiliser, la paume à l’endroit du choc et le regard jeté en arrière — en a-t-il profité pour te rattraper ? Non. Pire, tu ne l’aperçois pas dans ton sillage, et ne saurais reconnaître l’origine de cette torsion sous ton diaphragme. On croirait qu’un orvet s’y est entortillé. Cependant ta peur subite n’y est pour rien, de cela tu es certain ; elle, elle continue de battre la chamade sous ton sternum à l’instar d’un soliste fou de sa caisse claire, ram-ta-ta-tam, alors quoi ? Pourquoi n’est-il pas sur tes talons ? Comme avant, quand vous fuyez les adultes que vous aviez volés, les poches emplies de vieilles breloques et de coquilles de noix, pas grand-chose, des méfaits d’enfants, mais en ce temps-là il élargissait ton monde de sa malice, certes plus ombrageuse que celle de Renard quoiqu’aussi captivante, et tu l’aurais suivi dans tous les coups fourrés, qu’ils soient juste coups ou juste fourrés.
C’est bien cela, ce que l’on appelle un ami ?

Cet ami qu’aujourd’hui tu as fui en dépit du vœu qu’il t’a lancé et auquel tu n’as pas pris le mal de répondre. La terreur a tout négligé avant de se dissiper à la faveur d’une gifle, te redéposant hagard dans cette rue soudain trop vide. Où est-il ? Et surtout, pourquoi désires-tu qu’il soit là ? Tu devrais être soulagé de sa disparition, tourner le dos à cette aigre réminiscence et vomir le serpent qui lentement se détend dans ton ventre, mais non. Le reptile a mué. L’effroi ne t’est plus dévoué — c’est désormais à lui qu’il se dédie. Que lui est-il arrivé ?
Tu reviens sur tes pas. Trottines, fébrile, jusqu’à le retrouver, ce qui par chance ne te demande guère d’effort puisqu’il s’est arrêté avant l’angle où tu as tourné, sous une travée de bois qui servit peut-être de mât il y a des décennies de cela. Et quand tu discernes sa silhouette agenouillée au sol, les débris de ta rationalité finissent tout à coup de se déliter tandis que tes semelles s’élancent jusqu’à lui, te font quasiment déraper à ses pieds, bras ouverts pour le protéger de ces démons invisibles qui se sont abattus sur sa frêle échine.
Ton étreinte manque vous faire chavirer tous les deux. Puisqu’elle n’est ni légère ni heureuse, loin de là, elle le heurte plutôt brute et maladroite comme seules le sont les embrassades désespérées, comme si c’était toi qui en avais besoin à cet instant pour te réconforter, pour t’assurer que l’on ne t’abandonnera pas, pas maintenant, jamais. Tu as tellement peur — et ta peur l’enserre en retour, ce fantôme tangible que tu sens tressaillir contre ton torse d’oisillon paniqué.
« M-meurs pas..! » chouines-tu à travers ton souffle exsangue, le visage à moitié enfoui entre ses bois. « Reste vivant, reste ! Vis encore..! »
Ce n’est probablement pas tout à fait de cette manière que l’on prie quelqu’un de survivre, néanmoins l’affolement se veut d’autant plus cruel dès lors que tu y amalgames le décès d’Amaryllis ainsi que l’a convoqué la coïncidence du calendrier, mélange ô combien explosif à l’intérieur de ton myocarde. Heureusement que tu es déjà à genoux, car cette cataracte d’émotions douloureuses t’épuise bien plus que la course et cependant tu tiens, tu tiens parce qu’à ta place personne ne le fera, la meilleure leçon apprise cette année, personne ne le fera pour toi, et pas davantage pour la chimère que tu continues d’étouffer dans ta supplique.
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Les émotions, tendues comme les cordes dissonantes d’une guitare, jouent une triste mélodie dans son thorax. Ici la colère fait vibrer son coeur, la rancœur vrille son estomac, le regrêt grignote ses intestins… Jackalope sert ses doigts contre sa tête, il lui semble que tout est compliqué, trop compliqué pour lui. Il n’est pas préparé à ressentir autant de sentiment, pas en même temps, pas aussi confus. C’est comme une salade de fruit où les morceaux se décomposent pour donner une compote qu’il ne peut définir mais qui est détestable.
Lui aime pourtant quand les choses sont simples.
Des choses à détester, des choses à aimer, des choses contre lesquelles se venger.

Dandelion est les trois.

Et pour le lièvre cornu, ce n’est pas normal. Il ne veut pas que d'autres comme lui existent. Des anomalies… des chimères. Il est un monstre, un mélange entre plusieurs créatures car quoi ? Les alices s’ennuyaient ? Quelle injustice ! Il ne ressemble à personne, il est tant imparfait qu’il en oublie sa voix et ses gémissements se taisent au profit d’une respiration laborieuse.
Et il est seul. S’il a réussi à humer un souvenir pour en suivre une direction, ça n’a pas suffit et après plusieurs jours de recherche, ce qui devait être confrontation s’est transformé en abandon. C’est injuste, injuste injuste ! Les alices sont toujours comme ça, pourquoi celui-là serait différent ? Espérait-il que ce serait différent ? Ou voulait-il la confirmation de tous ses préjugés ? Ne l’a-t-il pas, ne devrait-il pas être satisfait ?

Mais une petite voix lui souffle… n’est-ce pas lui le premier qui a abandonné…?

Son souffle se change en sanglots silencieux.

Jackalope ne sait que faire de lui même, de cette mélodie tordue qui se joue en lui. Tout s’oppose en lui et sa encore trop jeune existence sature de ce trop plein. Ses mains se crispent sur ses douces oreilles qu’il tire, tire tire… ainsi il n’entend que son cœur tambouriner dans sa poitrine ; il a l’impression qu’il va s’abimer à ainsi trop fonctionner, à battre aussi furieusement. Peut-être est-ce pour ça qu’il a tant retardé d’affronter ses démons du passé. Son jeune corps ne pouvait le supporter.

Il ne sent la présence de l’enfant qu’une fois ce dernier jeté sur lui.

Jackalope manque de tomber à la renverse, surpris et non préparé à une embrassade si désespérée. Bien plus empathique qu’il ne le voudrait, la chimère sent la détresse de cette fleur légère et ça suffit à étouffer ses ennuis à lui. Il lui faut un temps pour se ressaisir, sa respiration lui revient petit à petit, son coeur bat avec les injonctions qui lui sont donné, ralentit, se calme… Il vit, il vit.
De son cocon protecteur, il gigote, sort laborieusement ses bras pour d’un frotter maladroitement et timidement le dos de l’alice, de l’autre l’enfouir dans la chevelure pure de l’alice.

Et de sa voix retrouvée, Jackalope susurre doucement “je suis vivant, je suis vivant…

Il repense à cette idée idiote qu’il a eu pendant ses recherches. Et Si Dandelion était mort ? Aurait-ce été étonnant ? Un jeune alice dans ce monde dément… Et son coeur s’était serré, la peur l’avait étreinte et il avait pensé à tout ce temps perdu et passé, qui ne pourra jamais être rattrapé. Et là, avait-il une seconde chance ?
Petit à petit, à contrecoeur, Jackalope acceptait : les choses étaient compliquées.
La vie, c’est merdique parfois. Et compliquée.

Calmement, il répète “je vais bien, je vais bien.” Il caresse les cheveux avec douceur malgré ses ongles semblables à des griffes. “Pardon.
Quelque part en 591 Ap.A

Dandelion
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Une éternité s’écoule avant que derrière ton sternum la chamade de ton cœur ne reflue jusqu’à n’être plus qu’une pulsation diffuse et apaisée. Le petit percussionniste a salué bien bas, sa prestation vient de s’achever et, épuisé, il se retire de la scène pour vous laisser seuls, ton ennemi et toi, ton ami et toi — ton trahi émoi. Car à la seconde où les mains de la chimère s’agitent en vue de se faufiler sur tes dorsales, où plus haut tes mèches se plissent sous sa caresse et où sa voix clapote de nouveau en douceur contre tes oreilles, tes muscles à l’unisson se resserrent imperceptiblement autour de son squelette comme pour lui signifier que ses mots ont trouvé le chemin de tes pensées. Tu les as entendus, rassuré par la répétition autant que par ses gestes ; il est vivant parce qu’il te touche, il va bien parce qu’il te parle. Aurais-tu besoin de plus ? Ô combien étrange, cette étreinte que vous n’aviez jamais partagée par le passé qui peut se supplanter à votre séparation et, déjà, en moins d’une minute, tenter de colmater la rupture, couvrant de mastic cette fissure que vous pensiez irréparable. Pourtant ce n’est qu’une solution temporaire, rien qu’un cache-misère, puisque la même fêlure perdure sur vos myocardes et qu’il lui faudra davantage qu’une fugace embrassade pour se résorber. Tu n’y penses pas. Encore un instant pour savourer. Oh, un seul, un dernier. Il est vivant. Il va bien.
Puis son pardon ricoche sur ta cervelle, la heurte sec. Pourquoi ? N’est-il pas simplement là pour te retrouver ? Les gens s’excusent pour leurs méfaits ou leurs bêtises, t’ont expliqué tes mères, sauf que tu ne discernes pas dans l’immédiat où se situe celle commise, vraisemblablement, par ton ancien camarade de larcins. Et ce ne doit pas non plus être la conséquence de son comportement actuel, de sa simple présence ou de ses griffes qui veillent à te pas t’écorcher l’épiderme, alors, s’il n’y a pas de raison à ses remords, il n’y a pas non plus de raison de les prononcer. Si ? Puis toi qui as fuis quand tu as cru apercevoir son image dans la pénombre, tu es le premier qui devrais le faire. Avec, au fond du fond, cette entaille de douleur qui refuse de livrer son nom.
« Pardon, non... Pas toi. »
Tu t’es reculé d’un cran, rouvrant l’espace entre vous afin de le regarder dans les yeux. Ces prunelles presque jumelles des tiennes, au jaune mielleux, vastes d’un millier de mondes à l’éclat ambré, ces iris safranés où l’on se perdrait comme au cœur d’un tournesol.

« Ja... Jackalope. » Les syllabes hésitent, semblent se rencontrer pour la première fois depuis des années, mal à l’aise. L’initiale, tu n’as jamais su correctement la prononcer ; elle s’aplatit toujours, isolée en [ʒ], tandis que tes voyelles sonnent trop haut, trop ouvertes, respirent la maladresse de tes vicissitudes phonétiques. Aucun motif d’articuler son patronyme que la simple envie de le faire, ou peut-être ta manière de lui prouver que tu t’en souviens, écoute, écoute, ce nom qui le ramène à la vie dès qu’il fleurit dans un recoin de ta mémoire — fragile saxifrage sur le granite fendu de votre relation. C’est vrai que c’est ta faute s’il est parti, tu ne dois pas l’oublier. Il te déteste. Rappelle-t’en. Tu l’as vu à la surface de ces étoiles tournées vers toi, à une époque où une éclipse de rage avait tout occulté de leur lueur joviale. Rappelle-toi. Il est vivant, il va bien, et il te hait. « Le pardon, c’est de moi. Je fais mal, avant, je te blesse et tu pars. C’est ça, oui ? Je suis vilain parce que... je suis vivant ? Et tu as mal par moi..! » Moins interrogation qu’affirmation, ton timbre craquelle, contrit ; ton regard fuit vers le sol, cherche à se réfugier entre les pavés pendant que tes doigts se tordent les uns contre les autres, instables près de ton ventre qui se tricote sur lui-même avec une aiguille trop pointue, juste au-dessus de ton bassin qui se décale vers l’arrière, près d’actionner tes jambes pour t’échapper. Une nouvelle fois. « Pardon pour le câlin : c’est vilain aussi... je crois ? » Celui-là, c’est à de vieilles rémanences que tu le dois, quand on essayait de t’inculquer les rudiments du respect de l’espace personnel d’autrui. Il faut avouer que certaines leçons sont plus faciles à retenir que d’autres. Mais puisque la chimère ne t’aime pas, par extension elle n’aime sans doute pas que tu la touches.
Tu tâcheras de lui épargner ces contacts, à l’avenir.
Une chance que dans l’Atlantide personne ne prête généralement attention à deux enfants à l’écart, et encore moins s’ils ne font que se tenir sages le temps de discutailler. N’empêche. Ton attention toute focalisée sur Jackalope, tu en oublierais que les environs ne sont jamais sûrs.
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Il s’était vêtu de colère. Il s’était paré à affronter, à rejeter, à frapper plus bas que terre. Jackalope voulait tant confirmer ce qu’il savait déjà et se séparer pour de bon de ces liens qui le hantait. -Lui, sauvé par un alice !- Il voulait lui rendre des souvenirs qu’il avait lus. -ils étaient trop douloureux, trop coupants, il les voulait faux pour son bien être.
Tout c’était mélangé ce soir-là quand d’effroi d’être en contact -d’être ami- avec un de ses cauchemar, la cage et l’ombre d’un passeur lui avait sauté dessus. Cet amalgame d'émotions étrangères mélangées aux siennes, à sa propre peur et à ses propres haines, des braises encore trop vives pour lui qui venait de s’enfuir de son enfer personnel... ça avait été trop. Il avait explosé, paniqué. Et il s’était rassuré depuis d’être dans son bon droit de l’avoir fait. Car… S’il le reconnaissait, S’il reconnaissait qu’il avait peut-être été njuste, qu’il s’était trompé de bourreau… il craignait de s'effondrer et de se briser au sol.
Alors, ce soir, il s’était armé pour rejeter, hurler que c’était de la faute de l’autre -n’importe qui !- mais pas de la sienne. Et être libre des doutes.
ça aurait été plus simple.
Jackalope aime bien le simple.

Mais tout est compliqué.
Et il se retrouve à nu, l’esprit clair dans cette embrassade quand il ne souhaite qu’être mauvais. Ces longs cils balayant ses yeux brûlants, sa gorge serrée l'étouffe. Il détestait le contact physique. Mais ça c’était avant. Avant Wopeltinger. Qui lui a appris la douceur. Et cette étreinte là… Elle a un goût qui n’est pas aussi mauvais que ce que Jackalope aurait souhaité. Elle sent la peine, la détresse, oui, mais aussi…
Quelque chose de plus doux.

Quand Dandelion s’éloigne, Jackalope respire de nouveau. Il renifle un peu, passe sa main crispée sur ses yeux. Son prénom est lâché et comme pour reconnaître et donner corps au fantôme devant lui, Jackalope prononce aussi “Dandelion”. Il n’y a plus le venin de la dernière fois. Il y a une timidité et de l'incertitude. Tout est compliqué.
Et il lui suffirait d’un souvenir pour s’en convaincre.
Mais pour l’instant…

Oh ? Tu parles mieux. C’est… bien. Bravo.

Félicite Jackalope en penchant la tête sur le côté. Il se sent bête. Mais c’est la première chose qui lui vient. Ses oreilles s’agitent. Elles se dressent quand il essayent de comprendre et s’abaissent sur sa tête quand la honte vient faire rougir ses pommettes. Oui, oui, c’est ça, tu es vilain car tu existes ! Mais jackalope n’a pas le cœur de le dire. Car il est nu de tout ce qu’il avait préparé, sa colère est à terre et il s’est assis dessus. Jackalope hésite, attrape ses oreilles duveteuses et les tire un peu de stresse.

Non, c’est pas toi c’est…” moi le vilain. Mais ça non plus il ne l’accèpte pas ”...Compliqué, je crois.” Car peut-être n’y a-t-il pas vraiment de vilains.

La chimère se sent bête. Démunie face à la situation. Rien ne se passe comme il le faudrait. Comme il l’avait prévu. Sa gorge est sèche et sa langue pâteuse. Il aimerait que ce soit simple. Il aimerait voir que personne n’a une vie comme lui, qu’elle n’a été imaginé que par des alices qui aiment le voir souffrir. Car il est une chimère.
Que personne ne lui ressemble.
Mais. Cette solitude est si lourde à porter. Si elle s’est allégée avec Wopeltinger… Il n’imaginait pas qu’un alice puisse lui ressembler.

Je vais te poser une question difficile. Si tu veux fuir, je ne te poursuivrais plus” Sa voix tremble, légère et cassante. Il approche à 4 pattes de dandelion et s’agenouillant, il lui prend les mains dans les siennes. Elles ne se ressemblent pas et pourtant, Jackalope les trouve presque semblables. ça l’apaise autant que ça le dérange.

Comment c’était avant que tu sois ici ?” Il force ses mains à rester légères. Des fois que cette fois, Dandelion veuille le fuir pour de bon. “Est-ce que…” Sa voix s'étouffe. Les mots enserrent sa gorge et son estomac se retournent. Il n’arrive pas à finir sa phrase, tout juste parvient-il à prononcer “...Cage ?

Il s’était vêtu de colère et maintenant se drape d’amertume. Car tout est compliqué commence-t-il à accepter.
Quelque part en 591 Ap.A
Dandelion
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Âge : 17 hivers
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Origine : Monde réel [fiction]
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Ton nom sur la langue de Jackalope est une reconnaissance. Couplée aux félicitations qu’il te prodigue, d’une déconcertante simplicité, elle se transforme en un plaisir qui entrouvre sur ton visage la courbe émaillée de ton sourire. La chimère a complimenté ta diction ! Elle a dit bravo ! Et même si sa louange se tarit bien vite, même si elle semble raide de gêne et qu’en retour tu ne disposes pas de deux excroissances poilues capables de trahir ton émotion mieux que les plis joyeux de ta figure, ce petit mot arrose de toutes ses lettres le petit bourgeon flétri de ton adoration qui ne demande qu’à repousser à l’attention de ton ancien complice. Vous avez du temps. Vous avez tout votre temps — du moins le crois-tu — aussi ne cherches-tu pas à le presser de parler ; tu patientes, sage, ta concentration tout entière dirigée vers lui, t’efforçant de la canaliser afin qu’elle ne s’éparpille pas trop vite vers les bruits à l’extrémité de la ruelle, quelque mouette perdue dans le ciel exigu du dôme ou un claquement de vitre non loin. Jackalope est là, devant toi, et même s’il camoufle derrière ses mimiques embarrassées la haine qu’il couvait à ton égard, tu ne peux que t’en remettre à ses paroles pour essayer de comprendre le maelström d’émotions tourbillonnant sur sa cornée.
Compliqué.
Un terme d’adulte pour définir ce qu’ils ne parviennent pas vraiment à définir. Tes mères l’utilisaient beaucoup, pour tout et rien, qu’elles aient su la réponse à tes interrogations ou non. Pourquoi les gens d’en bas acceptent leur sort ? Compliqué. Pourquoi les animaux savent d’eux-mêmes ce qu’il leur faut manger ? Compliqué. Pourquoi il manque l’annulaire à la main gauche de Lavande ? Compliqué. Pourquoi tu t’imagines toujours, pour te rassurer dans l’obscurité, qu’un énorme chat noir veille sur toi depuis les ténèbres ? Compliqué. Avec le temps, tu avais fini par entendre que ce mot-là s’amalgamait le plus souvent à de l’ignorance ou bien à de la honte, qu’il ne valait pas non plus trop insister au risque de recevoir une réponse un cran plus agacée ou, à défaut, un report à « quand tu seras grand », c’est-à-dire jamais, un geste de la main en prime pour te faire dégager. Pourtant, Jackalope reste, lui. Ne perce dans sa voix aucuns prémices à son exaspération, ne fleurit dans sa gorge aucune ire malhabile. C’est compliqué. Tu acceptes — ignores de quoi il parle véritablement — mais d’accord. Puisque c’est Jackalope qui le dit. Et que tu n’es plus vilain : tu es juste compliqué toi aussi.
Vous comprendrez quand vous serez grands, donc. En espérant que ce soit plus tôt que jamais.

La suite t’étonne en dépit de ton calme apparent. Ton sourire s’est éteint depuis un moment, remplacé par une mine aux abois et yeux grand ouverts comme s’ils se suppléaient à tes tympans, les doigts encore crochetés les uns aux autres jusqu’à ce que ceux de la chimère s’en emparent avec délicatesse et toi, y dénouant ton fugace malaise entre ses phalanges, tu le laisses faire. De ce geste soucieux ourlé de timidité, il te retient auprès de lui, alors comment pourrais-tu ne serait-ce que désirer lui échapper ? Ce n’est pas comme si tu étais capable de nourrir la moindre mesquinerie à son égard, la moindre envie de lui donner tort. Tu n’es pas vilain. Alors tu ne partiras pas tant qu’il ne l’exigera pas. À l’inverse, tu acquiesces à sa précaution, profitant du mouvement pour attarder ton regard sur ses mains autour des tiennes — et les sentir à l’unisson tressaillir à l’annonce du dernier mot.
C’est que tu avais d’abord songé, en parfaite innocence, que son avant concernait cette année écoulée sur les chemins du monde, ce que tu avais accompli avant de revenir ici, dans l’Atlantide, quand bien même il ne pouvait soupçonner que tu étais parti un an auparavant précisément, de sorte que tu étais prêt à lui livrer le récit décousu de tes aventures, à l’instar de tes retrouvailles avec Renard. Sauf que non. Il a poursuivi, a affiné son questionnement, tellement affiné qu’il n’est resté qu’un unique mot au bout de sa phrase poncée. Rien qu’un mot à demi-avalé, à peine mâché, un minuscule vocable, si dérisoire, qui a fouetté brut ta conscience. Sur le coup, tu n’as rien dit. Interdit. Puis la douleur a irradié le long de l’entaille, elle a suinté en un trait vif qui a aspiré tout le sang de ta face : blafard, tu as dévisagé Jackalope. Enfin, tu as essayé, puisque déjà son image s’en trouve rayée de sombres barreaux, déjà la pénombre s’est épaissie en une poix opaque où ta respiration s’englue et tes pensées pataugent. Avant. Cage. Là-bas. Dans ce passé que personne encore n’a exploré. Que personne ne souhaiterait explorer. Et surtout pas toi.

« R-ramène-moi pas... eh... tu veux pas me ramener, non, me rentrer pas... »
Ta voix racle, sur la brèche — tu ne la perçois qu’à travers la vibration sourde qui monte de l’intérieur de ta mémoire, pareil à un murmure assourdissant, à un son de gorge, de dizaines de gorges enfouies sous terre et qui rampent le long des couloirs au rythme de ces vagues gutturales qui semblaient hanter les recoins de ta cellule. Même les paumes plaquées sur tes oreilles ne parvenaient pas à en chasser le bourdonnement. Pas plus qu’aujourd’hui, d’ailleurs. La rumeur perdure. Tu as beau avoir brusquement rompu le contact avec Jackalope pour lever les mains sur tes tempes, elle ne part pas. Tes yeux fixent le vide avec effroi, quelque part sous le sol entre tes genoux, au-delà de la matière, au-delà de l’instant, ils se fixent et cependant se perdent Diable sait où, puisqu’il n’y a que le Diable pour te jouer ce tour-là, n’est-ce-pas, c’est lui qui fredonne du fond de tes souvenirs, ombre parmi les ombres, lui qui a fondu l’empreinte de sa main sur ta cuisse, lui qui entaille ton derme pour en lécher le substrat, lui qui rôde où que tu ailles dans ce dédale de tunnels, toujours prêt à t’attraper, à te corriger, à mettre un cadenas sur la boîte où il t’a enfermé et à s’asseoir dessus pendant que tu tapes des poings à t’en faire saigner.
« Ramène-moi pas, je suis pas... pas vilain. Je veux p-pas rentrer. Pourquoi tu... tu veux..? »
Tu cauchemardes éveillé, une aiguille infernale plantée en travers de la trachée. Dans tes viscères la nausée enfle acide, elle campe dans ton estomac en guettant le hoquet de trop quand tes joues rivalisent de pâleur avec ta chevelure et que tu tentes de déglutir, hagard, recroquevillé de douleur sur ton estomac.
Avant, personne ne savait. Il n’y avait que toi et tes nuits intranquilles, toi et ton vocabulaire de poussière incapable de convoquer ces réminiscences honnies. Et toujours quelque chose ou quelqu’un pour t’occuper l’esprit, que l’on n’incitait pas à se remémorer. C’était mieux, avant, quand personne ne savait.
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Mais il sait. Presque. Et c’est ce qui lui permet de ne pas partir et laisser l’alice juste moisir ici.

Toujours assis par terre, Jackalope a observé… les mains filer loin des siennes, comme si son contact était brûlant, pour s'agripper aux tempes. Il ne les serrait de toute façon pas pour laisser le mouvement libre et ne pas griffer par inadvertance. Il n’en est pas vexé. Ne sachant quoi faire des siennes, il les laisse tomber à même le sol, frôlant de ses doigts les pavés humides. Et avec un étrange détachement, il regarde l’enfant (ne l’est-il pas aussi, dans le fond ?) sombrer et se noyer sans sa panique.
Il aurait envie de rire aux paroles de Dandelion. Quelle ironie ! Ça fait tellement écho à tout ce qu’il fait. Le ramener ? Il n’en a aucunement le pouvoir. Ne l’a jamais eut. Ne l’aura jamais. Il prétend le faire et aidé de sa tendre complice, il arnaque et vole argent et espoirs aux alices.
C’est sans doute aussi pour ça que Jackalope ne se sent pas paniquer à la vue de Dandelion qui s’enfonce dans son cauchemar.
En face. C’est un alice. Il en a tant vu perdu, pleurer, désespérer…

Qu’il en est immunisé.
Un de plus, un de moins…

Il s’est dressé des murs d’indifférence pour ne pas souffrir à chaque arnaque. Pour pouvoir les faire et le lendemain, reprendre sa vie sans penser dans quel enfer il aura laissé sa victime. Des gens qu’il dépouille et dont il dépense l’argent qu’ils ont parfois durement gagné.
Il tire même parfois plaisir à voir la souffrance des alices qu’il brise.
Mais maintenant, il ne rit pas.
Les murailles sont fatiguées, usées. Une dizaine d'années d'existence ne lui ont pas permis de les construire des fondations solides. Un coeur pas trop pourris fragilise ses convictions basées sur le sol tapissé de ses souffrances qui ont valsé avec l'irrationalité.
Et tout se fissure. En silence, dans à peine un murmure…

Jackalope approche, lentement, se met face à l’alice, son ancien ami, celui qui l’a apprivoisé il y a si longtemps. Doucement, il prend une voix calme et murmure :

Je vais mettre ma main sur ton genoux.” Il le fait avec une délicate légèreté, une douce tendresse. “Et tu vas te concentrer sur cette main. Est-ce que tu la sens ? Est-ce que tu m’entends ?

Tout en douceur, Jackalope tente de faire revenir l’alice dans le présent. De le faire revenir avec lui.
Et il lit.
Il ne demande pas la permission. Ce souvenir si vivace, il sera rapide à percevoir, à voir. Car il a besoin de comprendre.

Pourquoi la fissure. Il veut savoir. Pourquoi commence-t-il tellement à se dire que… c’est compliqué. Il a besoin de savoir. Complètement.
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