Le jour se lève, perce l'obscurité de ses rayons rougeoyants. Ils miroitent sur tes doigts humides, sur la rosée écarlate qui recouvre les feuillages. Autour de toi, la vie s'agite en même temps qu'elle s'éteint. Tu serres les dents, referme tes mains meurtrières sur leur proie. Pas une larme ne s'écoule de tes yeux, tu les as toutes pleurées plus jeune. Aujourd'hui, tu t'es fait à ce quotidien, te contentant de voir cette réalité comme le cycle de la vie.
Une branche craque, tu te retournes et tes billes d'ambre croisent le regard d'un rongeur apeuré. Tu fais mine de tendre la main, mais t'interrompt, refermant tes doigts sur ta paume. Tu as tout du monstre pour ceux qui étaient autrefois les tiens. Tu soupires, le laisse fuir, il n'est pas ta proie; aujourd'hui. Tu te redresses, accrochant ton butin à ta besace. Tu passes la corde de ton arc par dessus tes épaules avant de sortir une gourde d'eau pour laver tes mains souillées alors que tu laisses les souvenirs de tes victimes emplir ton esprit.
Une vie simple, qui était la tienne autrefois, désormais baignée de sang et d'injustices. Tu refermes ton sac et récupères tes flèches avant de tourner les talons, quitter la forêt désenchantée pour retrouver les pavés de la ville. Rares sont ceux qui s'y aventurent en solitaires, cependant, tu ne crains en rien d'oublier, effleurer un simple tronc maudit suffit à raviver tes souvenirs perdus. Même si tu le voulais, tu ne saurais effacer ta mémoire et ta nature coupable.
Tu te masses la nuque endolorie par les nuits passées sur une paillasse défraîchie et les heures qui se sont écoulées à mesure que le bois prenait la forme de tes prises de la veille. La nuit s'est couchée sous tes mirettes alors que tu observes la foule s'éveiller, la ville prendre vie sous le jour nouveau. Il est rare que tu rentres si tard, tu t'es perdu entre les arbres, en quête de quelque offrande à remettre à ton bienfaiteur.
Il a toujours été compréhensif et patient avec toi. Il t'a offert milles voyages, appris à déchiffrer les signes ésotériques qui dessinent désormais mille et une histoires dans ton encéphale. Sans ses apprentissages, tu serais probablement devenu fou, ou pire. Tu souffles du nez, troquant ta mine grave contre un sourire bienveillant lorsque tu aperçois la boutique ambulante.
Tu presses le pas sans le réaliser, ton sourire se faisant plus large alors que tu lui mets le bouquet de fleurs d'artipomme parsemées de quelques grenats chipés à proximité des jardins de la reine.
- Regardes ce que j'ai trouvé !
Tu passes ta tête sur le côté pour chercher son regard, la moue timide.
Le soleil se lève, le petit hibou rêve. Il revoit le temps, où un jour de printemps, le petit prince est né, par un matin ensoleillé. Lui tout endormi, doit sentir le roussi, des ses plumes imprégnées d’un doux rayon d’été. Souvenirs ravivés, douleur infligée. Il s’imagine la paix, quand cette dernière régnait, le soleil à travers le feuillage qui faisait office de nuage. La joie des petits compagnons, qui empêchaient de tourner en rond. Oh, Archimède ! Quel remède ? Lequel contre le cafard ? Car son teint est blafard, trahis ainsi quelques nuits, troublé par un profond ennui. Le voilà nostalgique, de cette douce musique, celle de la forêt où tranquillement il dormait.
Il sent le chaud, voit les flammes de si haut, leurs langues dévastatrices dévorer les novices ! Les pauvre victimes, celles que les cimes, n’ont pas pu protéger et ont été emportées. Pas le temps de pleurer car le petit prince est enlevé ! Archimède panique et c’est bien là le hic, car dans sa confusion il devient un peu con.
Les ailes déployées, le voilà prêt à s’envoler ! Pour finalement s’encastrer dans son plafonnier. Il tombe au sol, comme une vieille feuille molle. Tout plein de questions, il se demande d’où vient la contusion. Il rêvait du temps d’avant où tout était riant ? Et maintenant, le voilà qui entend les quelques voix d’une place de marché de choix. Cette dernière se prépare, c’est qu’il doit être un peu tard. Il ferait bien de s’y mettre, ce grognon petit être.
Il se transforme et le voilà qui marmonne : “Purin d’humain et leurs train-train !” Il préférerait dormir, mais il faut bien se nourrir, lui et son cheval, oui, ce serait pas mal. Maintenant habillé, mais mal réveillé il passe donner son grain au bien brave Picotin. L’échoppe est ouverte, finalement ! Juste à temps pour voir passer son garnement. Il n’a vu que le sourire et ses lèvres aussi s’étirent. Lui qui ne souhaitait jadis que la paix, le voici ami avec la source de ses soucis. Le regret pointe-t-il ? Et bien s’avoue-t-il… Pas un instant, pas un moment.
Mais ce hibou si mal avisé ne sait trop comment aider. Alors il tente sa chance à devenir de confiance. Il accueille le bouquet dans un semblant de hoquet et l’inspecte de ses yeux qu’il a au bon nombre de deux.
“Merci” petit prince a-t-il faillit dire avant de tressaillir et se ressaisir. Ce serait si bête de tout trahir. “ J'aime en effet les fruits, bien plus que les souris. Mais vous ne prenez pas de risques inconsidérés pour me ramener de telles raretés ?”
Son regard se fait grondeur, les sourcils foncés avec lenteur. Mais bien plus que courroucé, le hibou a l’air fatigué. “ Vous êtes donc déjà éveillé. Puis-je vous offrir un café ?”
Ce serait la moindre des politesses pour sa majesté son altesse.
Quelque part en 591 ap.A
Bambi
Nouveau-thé
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Citation : “I'm not strange, weird, off, nor crazy, my reality is just different from yours.”
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Qu'il est habile avec ses mots, sa verve est gracile, elle rime, danse sous sa langue pour flotter jusqu'à tes oreilles. Tu restes un instant interdit, savourant la douce mélodie de sa voix, à l'image des histoires qu'il te contait avant que tu n'apprennes à lire de tes propres synapses, loin des accents dramatiques qui te plongeaient dans les récits. Ses mots te ramènent à la réalité, ton sourire ne vacille pas tandis que tu hausses les épaules avec désinvolture.
- Ils ne faisaient que trainer... Ce qui vient de la nature devrait être la propriété de tous.
Tu ricanes gauchement, te grattant la joue, comme pour chasser un grain de culpabilité qui s'y serait perché. Tu te redresses à sa proposition annonçant fièrement :
- Je me lève toujours à l'aurore !
Loin, bien loin de ta vie d'insouciance où la nourriture poussait tout autour de vous, livrée à même le lit. Ici tu chasses bien plus que tu ne cueilles, tu réserves ces gestes pour ta mère et ton mentor. Tu l'observes un instant, a-t-il toujours été si petit ? Si frêle ? Autrefois tu te sentais minuscule face à son savoir et aujourd'hui, bien que son savoir te semble toujours aussi immense, ta stature s'est développée et tu l'as si rapidement dépassé.
Tu relâches le bouquet, toujours la mine enjouée alors que tu recules sagement d'un pas, te frottant le nez. Tu n'es pas de nature timide, mais le libraire a toujours eu une place particulière, tu veux le rendre fier, c'est ton petit îlot de sanité dans ton océan de tourments, tiraillé entre la morale et le désir de protéger ta mère.
- Vraiment ?! OUI !
Si ton expression est douce, ta voix l'est moins, on pourrait t'entendre beugler depuis le palais, un gosse s'extasiant à la moindre nouveauté. Tu lèves timidement les yeux vers lui, tentant de retrouver une posture décente et désinvolte.
- Je veux dire, avec plaisir.
Tu te masses la nuque en ricanant.
- J'ai fini le livre de la dernière fois... je ne l'ai pas pris avec moi, je ne pensais pas vous trouver si tôt. Je peux aller le chercher si vous voulez, ça ne prendra qu'un instant.
“Oh” fit le hibou “voilà qui changent tout.” Car si les plantes, à moins qu’il ne mente, ne sont à personne, aucune chance qu’une alarme ne sonne ! Pourtant, sous son sourire, le hibou ne fait que mentir. Son acceptation de ces belles explications ne sont que feintes et sa bonne humeur peinte se peine, chose qu’il ne cache qu’à peine. “Mais même dans la nature, si quelques uns d’aventure, arrosaient et s’occupaient d’une roseraie, les fleurs se seraient-elles pas leurs ?” Il observe les merveilleux fruits et de malice, le rapace sourit. “Si un fruit est planté, arrosé et cultivé par un jardinier. Est-il encore à la nature ? Ou n’en a-t-il que l’allure ?”
Cesse donc petit hibou, d'embêter ce petit bout ! Archimède lâche un rire et arrête bien là toute son ire. “Merci, c’est un joli cadeau, j'aimerais juste que vous n’y laissiez pas votre peau.”
Il les pose sur son comptoir et arrête de faire des histoires. Il s'affaire alors, à faire couler un peu d’or. Aussi sombre que soit le café, la boisson lui permet de tenir ses journées. Ce n’est certes pas un WonderWisper, mais ce sera suffisant pour l’heure. À l'exclamation du prince, il frissonne, son cœur se pince.
“Au aurores ? Mais ça alors ! Quelle horreur.” car il n’y a pas d’heure pour dormir, se permet-il de sourire. Mais pour se lever, le plus tard est préféré ! Mais le faon saura que sous cette mauvaise aura, le hibou n’est méchant pour un sous. Son caractère grognon, aussi froissé qu’un torchon, cache un coeur d’or ainsi deux cafés prépare-t-il dès lors. Il fait bouillir de l’eau, dans un vieux pot, prépare sa cafetière à piston et pour lui et son compagnon, met assez de café d’un geste exercé. Car pour connaître, il faut bien reconnaître que cette boisson est le meilleur des poisons. Une chaleur qui, aux premières lueurs du matin, fait bien du bien et qui délie les langues, parfait pour s’introduire au gang. On attire la sympathie ‘hey ! regarde, voici le petit !’ et on obtient des nouvelles sans même donner un coup d’aile. Archimède a bien appris, il ne sera plus un abruti.
Son jeune ami -devait-il en être surpris ?- semble enthousiaste, tout un contraste avec le hibou mou du genou. Mais qui dirait non à cette douce boisson ? Car Archimède ne mesure pas, toute son influence sur le jeune as. Lui, ce qu’il souhaitait, vraiment ce qui importait, c’est d’être considéré, être un ami sur qui compter. On pourrait dire qu’il lui a appris à lire afin de rester à jamais à ses côtés. Ce sera toujours du temps de gagné avant qu'une solution ne profile son nez. S’il vous plaît, majesté, je veux vous protéger Alors quand il menace de rentrer pour un livre aller chercher, le cerfs fait que les serres du rapace se serrent. “Inutile” répond-il prestement “Vous le ramènerez dans les temps.”. Finalement infusé, le café est pressé, versé et dans des tasses en fer est servi. “Aucun souci.” répète le hibou “Inutile de partir. Ou le café va refroidir.”
Qu’est le hibou prêt encore à faire pour se mêler des affaires du cerf ?
Il trempe ses lèvres en silence, se brûle un peu la panse, son air encore un peu endormi ou bien chargé de soucis, qui semble trahir ses inquiétudes à venir.
