C’était la tournée de routine : s’empiler tous ensemble dans la caisse de Marco et rouler de commerce en commerce réclamer le pizzo des retardataires. Marco avait mis sa playlist ringarde, Lucas avait ouvert sa fenêtre en grand, ce à quoi tous protestèrent. Après un peu de persuasion elle fut majoritairement fermée, juste de quoi emmerder Biagio et son arrangement capillaire cache-calvitie. Ils étaient chanceux, Lucas n’avait pas l’énergie à plus. Sa tête s’était d’ailleurs calée d’un côté et pas même l’envie de sauter de la fenêtre aux premières notes de « Ti amo » ne suffit à l’y déloger. S'il luttait contre la fatigue, c'était uniquement car il était de corvée de guet, et que si Marco se rendait compte qu’il avait fait nuit blanche, il l'enverrait livrer des colis pour un petit moment. Il bâilla discrètement, jetant un œil dans le rétroviseur pour vérifier que Marco ne le voyait pas.
Malheur : il regardait justement dans sa direction.
- Tu as fait ce que je t'ai demandé ?
Panique impassible. Réponse désinvolte.
- Ouais, répondit Lucas.
Non. Il ne savait même pas à quoi il faisait référence. Plus tard serait encore temps de se creuser les méninges et de se rendre compte de la hauteur de sa faute. Marco en tout cas sembla satisfait, revenant à la route avec un sourire en coin, permettant à Lucas de regarder en paix le paysage, sans même que les informations visuelles daignent atteindre son cerveau.
Ils arrivèrent vite chez leur premier pigeon client, et pendant que les plus motivés faisaient la conversation, Lucas se contenta de sortir de la voiture pour faire office de personnage menaçant en arrière-plan. Il se frotta les yeux : la lumière était violente contre les façades blanches.
La troupe d'artistes rentra avec le mec qui allait passer un mauvais quart d'heure (ça se devine à la quantité de sang restant dans son visage). Lucas, lui, se retourna pour regarder la rue. La porte se ferma derrière lui.
C'était désert. Et ça l'était souvent quand ils s'annonçaient aussi ouvertement. Pour une petite touche comique, on aurait pu, à l'instar des films de cowboy, faire traverser la rue à un nid de tagliatelles poussé par le vent, mais nous sommes plus sérieux que cela. Plutôt, nous raconterons comment le soleil réchauffait les murs et que c'était pour cela que Lucas s'y était adossé, les bras croisés pour retenir les calories.
Dans son torse il y avait une sensation de confort inconfortable, sirène promettant les délices du sommeil. Il était si bien, il n'y avait personne, alors, rien qu'un instant, s'il pouvait se permettre…
Lucas ferma les yeux et leur brûlure s'apaisa.
BANG
Le sursaut le ramena brutalement à la réalité, mais plus étrange encore : il y avait quelqu’un. Devant lui, à quelques dizaines de mètres. Tout blanc, en robe, avec des oreilles et des gribouillis sur le visage. Le cœur de Lucas tambourinait. L’urgence du coup de feu était dérivée par le spectre du bout de la rue. Marco et les autres étaient plus que capables de s’en sortir.
Alors lui, qu’est-ce qu’il voulait ?
C’était pourtant ni carnaval, ni Halloween, et il n’y avait pas de conventions de ces dégénérés d’anime boys dans le coin, c’était on ne peut plus certain.
- Eh, toi ! Retourne d’où tu viens ! Cria Lucas.
On ne fait pas de projections de Naruto aujourd’hui, rentre chez Mama. Pour être tout à fait sincère, Lucas se sentait de plus en plus mal à l’aise en sa présence, si peu humaine, en un sens ? Quand s'était-il seulement approché, sans un bruit pour l'annoncer ?
moon est en voyage enfin.. il suppose qu'il travaille
Mais puis que son job consiste à voyager et ramener des sujets à Petra.. ça revient au même. Alors Moon voyage. D'un monde d'Alices à un monde d'Alices plus tard à.. un monde d'Alices plus tôt. Ils changent sans changer, aux yeux délavés du passeur. L'air contrarié de celui-ci ne fait que confirmer ses impressions.
moon n'est pas à sa place ni ici, ni dans les Otherlands mais ça ne l'a jamais rendu moins curieux
« D'où je viens ..? rit-il, penchant la tête sur le côté, Tu m'aurais vu arriver ? » ça serait surprenant
Moon est à peu près certain que l'Alice était trop distrait pour remarquer son approche. Distrait voire assoupi. Mais il ne demande qu'à être surpris. Plus le temps passe, moins cela devient courant. Le Passeur suppose que malgré la lenteur avec laquelle son apparence change, il devient bel et bien vieux.
C’est qu’il rit Sailor Moon. Légèrement, comme si la situation ne représentait rien pour lui. Que l’agression verbale ne le touchait pas.
Nullement ébranlé par le coup de feu, Il a le dessus, il ne craint rien.
Pas le couteau le plus affûté du tiroir, quoi.
— Hein ? S’étonna Lucas, qui, ne comprenant pas la logique de la question, l’avait déjà oubliée.
Il n’y pouvait rien, ces paroles arrivaient à ses oreilles comme des répliques d’un personnage de shonen. Mais personne ici-bas n’était le protagoniste, et celui qui se mettait une troupe de loubards à dos ne s’en sortait jamais héroïquement.
Un coup d’œil en biais fut lancé à la porte derrière lui. Lucas réalisait enfin que c’était calme, affreusement calme. Il serait bien allé voir, mais il y avait gêneur et témoin.
Indécision.
Devait-il vraiment s’occuper d’un petit rigolo alors que la situation était tendue ?
Il était fatigué.
Mais Marco lui ferait la peau s’il laissait passer ça. Déjà qu’il n’était pas dans ses bonnes grâces, en ce moment. Et le mensonge, il avait failli oublier son mensonge. Ouais, il devait définitivement se bouger le cul.
Adieu repos tiède du guetteur.
— Tu te trouves drôle ? grogna-t-il, se décollant enfin du mur et le menaçant en ouvrant les bras.
Ce gars là faisait sûrement le malin parce qu’il était loin et caché par son costume.
Lucas s’avança, Renifla, s’essuya le nez de son pouce. Il devait s’en débarrasser rapidement.
oh voilà qu'il est.. confus ? contrarié ? plutôt contrarié
Ca sonne comme un problème, mais pas le sien. Moon est contrariant de nature, de ce qu'il a cru comprendre à force d'interactions désastreuses, alors il ne s'en inquiète plus. (pourtant, une légère brume commence à se former) Ses yeux clairs restent tournés vers l'Alice. Son sourire ne flanche pas. C'est toujours une expérience curieuse, d'interagir avec les futurs sujets de Petra, alors Moon reste attentif.
il regarde la porte puis le Passeur
Mh, serait-il donc un garde ? Ca expliquerait sa demande précédente. Pas son agressivité, en revanche.. quelqu'un aurait-il mis du sel dans son thé, ce matin ? Moon le regarde grogner en se contentant de hausser un sourcil.
« Je te trouve drôle, corrige-t-il, les Alices le sont toujours. » d'une façon ou d'une autre
C'est sans une once d'inquiétude que le Passeur le regarde approcher. Son expression n'est plus très jolie. Elle en devient un brin familière, en revanche. Moon peut presque sentir les ondes de mauvaise humeur faire frissonner l'air du rêve. Pourtant, il l'étudie toujours sans sourciller. Si son nez se mettait à trembloter, il serait vraiment très familier.
il lève les mains vers lui Moon pivote pour l'éviter
« On ne se connait pas assez pour ça. commente-t-il, avant de lui tendre une main, Pour des inconnus, une poignée de main serait plus appropriée. » parait-il
Lui oublie de dire bonjour de façon régulière, mais c'est.. ce qu'il lui semble avoir observé.
La brume se levait, et Lucas ne la voyait pas. Trop de perturbations s’accaparaient son esprit fatigué.
« Je te trouve drôle, Alice. », voilà ce qu’il avait retenu de ce sourire inconscient.
C’était insultant. Pas pour lui, pas vraiment, mais pour ce rôle qu’il tenait, pour la famille, aussi, ces choses abstraites auxquelles il devait faire semblant de tenir. Pour les yeux au travers des volets et des rideaux tirés, les oreilles furetant au niveau des soupiraux. Il devait s’énerver. De ne pas être pris au sérieux, lui et ce qu’il représentait.
Ses enjambées s’allongèrent, son regard fixa, ses muscles se crispèrent. Ses bras se propulsèrent avec violence. Il voulait l’expulser, changer le genre de la pièce de théâtre. Morsure du pavé, Goût des semelles, Retour forcé à la réalité.
S’il avait effleuré le tissu, c’est le vide qu’il poussa (et lui-même par extension), perdant l’équilibre et le rattrapant par quelques pas trébuchés. Lucas se retourna instinctivement, déboussolé par l’invraisemblable.
Presque un sursaut, il recula à la main qui se tendait. Il releva un regard ardent jusqu’au sien, le dévisageant rien qu’un instant. Aikido se foutait de sa gueule, encore. Ses dents se serrèrent. L’agacement devenait personnel.
Son poing frappa sa gorge.
Enfin, une juste vengeance. Lucas aurait dû ressentir un soulagement. Il aurait dû pouvoir rire un bon coup et lui dire de redescendre sur Terre, de respecter les hommes d’ici ou il pourrait tomber sur un autre bien moins diplomate, la prochaine fois. Mais quelque chose clochait.
Ce n’était pas lui, mais Sailor Moon qui riait. Le sourire de Lucas s’effaça. L’intrus passa à côté de lui, s’approchant dangereusement de l’endroit qu’il gardait. Lui demandant ce qu'il s'y cachait. Un frisson glacé le prit.
Se précipitant, Lucas saisit l’épaule de l’étranger, en fit le tour pour s’interposer.
— Mec, mec, sérieux, tu vas avoir des problèmes, dit-il, soudainement bien plus conciliant, alors qu’il voulait dire « Je vais avoir des problèmes ».
Si Sailor Moon risquait bien des choses à mettre son nez là-dedans, Lucas s’en fichait bien. Ça l’aurait presque rassuré que ce type ne soit plus son problème mais celui de tout le monde, parce qu’il lui filait les jetons.
— Tu ne dois pas être d’ici ? Il laissa s’échapper un petit rire, mal à l’aise, ne comprenant rien à ce qu’il se passait. Ça expliquerait des choses.
Lucas posa presque son dos contre la porte, mais se ravisa en se rappelant du coup de feu. Silence silence dans la maison. Il tapota l'épaule de l'étranger avec un sourire.
— Juste, continue ta route, ok ?
Supplique un peu dure, demande indulgente ? Si on lui avait dit qu’un jour il craindrait un cosplayer.
ça n'a pas l'air de marcher aurait-il fait erreur ?
Il semblait à Moon que les poignées de main étaient un salut assez universel, mais à en juger par l'expression de l'Alice, il s'est encore fourvoyé. Ca, ou il n'est simplement.. pas décidé à le saluer. Flagrant manque d'étiquette. A ses reniflements disgracieux, cela dit, le Passeur aurait sans doute pu deviner. Voilà qui ne fera pas l'affaire face à Petra.. peut-être devrait-il dissiper le rêve maintenant.
puis on le frappe à la gorge et Moon change d'avis
Oh, il fera parfaitement l'affaire. Aucune reine ne refuserai un tel bouffon, si ? Moon a un léger rire à l'idée, frottant distraitement sa gorge sans s'y attarder. Ce n'est pas qu'il n'a pas eu un peu mal, mais le fait d'être dans un rêve rend la sensations si distante.. il ne s'en inquiète même pas. (il y a plus intéressant, à commencer par l'Alice) Au lieu de ça, le lapin pivote vers la porte qu'il semble garder avec zèle. Que peut-il bien y avoir derrière ?
« Qu'est-ce qui se cache par là-bas ..? Ca doit être important. » demande-t-il, curieux
Et visiblement, il n'a pas tort. Une étincelle danse dans ses yeux lune tandis que l'Alice s'interpose. Il va avoir des problèmes, parait-il. Moon penche la tête sur le côté. Etudie son expression. Non. Non, il ne pense pas. Moon n'a généralement pas de problèmes. Il est plutôt du genre à créer des problèmes pour les autres et s'en aller le temps qu'on les résolve à sa place.
ça a toujours plutôt bien fonctionné pour lui, bien entendu
« Hm j'entends ça souvent. » rit-il, parce qu'effectivement il n'est pas d'ici
Pas que Moon se voie comme 'de quelque-part', de toutes façons. Appartenir à quelque-chose ne résonne pas avec lui. (à moins qu'il s'agisse d'Honeymoon) L'Alice lui tapote l'épaule, essayant visiblement de le convaincre de partir de façon moins brutale que tout à l'heure. Etrange. Ca ne fait que rendre le passeur plus curieux. Il semble.. effrayé. Où est passé son bravado de tout à l'heure, de demande Moon avec une touche de déception. La brume s'épaissit avec son ennui.
« C'est par là que l'allais, à vrai dire. » fait-il en haussant les épaules
Dans le dos de l'Alice, la porte grince. S'ente-Ouvre. La pièce est sombre et si Moon ne sait pas exactement ce qu'il y a derrière, il sent des odeurs moyennement intrigantes. De la poudre à canon. Quelque-chose de métallique et étouffant. Moon a beau pouvoir contrôler le rêve, il est en phase assez 'libre', en ce moment. Il utilise l'inconscient de son rêveur pour certains éléments qui ne lui sont pas familiers. Après tout, comment parviendrait-il à créer des rêves convaincants autrement ?
« Ca n'a pas l'air très accueillant mais.. c'est le seul chemin. » ajoute-t-il, poussant la porte par dessus l'épaule de l'Alice
Ce qu'il y a derrière ne dépend pas entièrement de lui. Il est bien curieux de savoir ce qui inquiète tant cet Alice.
Grincement. Lucas fit volte-face et se bouscula contre son interlocuteur dans sa tentative de recul. La porte s’entre ouvrit et poussa un soupir sanguinolent.
Well, that can’t be good.
Immobilisé dans une position peu flatteuse, il fixait l’entrebâillement. Qui avait ouvert ?!
Aucun bruit, aucun mouvement, avaient décidé ses nerfs. Ce qui se cachait dans l’obscurité avait réduit au silence sa bande de troubadours, alors
Pas. Un. Bruit.
Mais brisant la tension, Lui arrachant un sursaut et un coup de coude réflexe, Une voix s’éleva.
— Ça n'a pas l'air très accueillant, mais.. c'est le seul chemin.
Son goku poussa la porte.
Mais il est FOU ??
Faute de pouvoir s’échapper, Lucas s’accrocha à ses vêtements. Au pire, il le balancerait sur l’agresseur. Contre toute attente, rien ne se produisit.
Il faisait sombre à l’intérieur, mais il y faisait aussi blanc. Et à moins que ce soit de la fumée, ça ne faisait pas grand sens. Notre jeune thug ne se posa pourtant pas de question, autre chose retint son attention. Un pied dépassait du canapé, marinant dans une flaque de sang.
Here we go again.
Sa main rejoignit sa poche, y saisit son couteau à cran d’arrêt, en sortit la lame. Avant d’entrer, il secoua silencieusement les doigts à l’intention de la fabrique à complications.
Dégage Einstein, tu vas nous faire tuer tous les deux.
Surveillant les angles morts, sur le qui-vive, il s’approcha, fit un signe de croix avant de regarder au-dessus dossier et poussa un soupir : c’était Biagio. Il s’avança à ses côtés, baissa la tête et lui asséna un vilain coup de pied dans les côtes. Le cadavre ne broncha pas.
— Ouep, il est mort, dit-il, bas, mais nonchalamment.
Il en aurait été heureux si la situation n’avait pas été pas aussi tendue. Il aurait également bien récupéré son portefeuille si monsieur fantôme ne s'était pas résolu à s’occuper des oignons des autres et avait tourné les talons. Maintenant qu’il y réfléchissait, c’était étrange. Pourquoi était il apparu à cet instant précis ? Pourquoi n’avait-il peur de rien ? N’avait-il pas dit qu’il allait ici, spécifiquement ?
Oh. La conclusion le frappa.
Byakugan était dans le camp de ceux qui avaient tué Biagio.
Lucas n’osa pas se tourner vers lui, fixant la peau verdâtre de son collègue comme pour y lire son futur. Et maintenant, quoi ? S’il s’enfonçait dans la maison, il y aurait d’autres tarés. Et vers la sortie, il y avait terminator déguisé en Sailor Moon. Pour s’en sortir, il lui restait l’approche naïve.
— Reste là si ça te fait plaisir, dit-il d’une aisance forcée, moi je me casse.
Chose qu’il illustra sur le champ en se dirigeant vers la sortie.
la porte cache des horreurs en voilà, une surprise
Moon entre et la brume le suit. Et l'Alice le suit, visiblement à contrecoeur. Est-ce donc là ce qu'il voulait cacher ? A-t-il quelque-chose à se reprocher ? Moon n'est pas sûr de comprendre, il le pensait surtout effrayé. Comme si pousser cette porte mettait cette vie en danger. Le passeur ne résiste pas lorsqu'on lui fait signe de rester en arrière, plus curieux de voir la réaction de l'Alice que d'explorer le cauchemar lui-même.
Il a sorti une lame. Ne la pointe pas sur Moon. Se sent-il plus en danger encore que lorsqu'il l'a frappé à la gorge ? Sans doute l'odeur de sang et l'obscurité ne le sécurisent-ils pas. Il y a des morts, visiblement. Moon le regarde faire les geste des Alices qui croient en quelque-chose de plus élevé qu'eux. (ceux qui pensent que le père de Miss Fair est respectable) Il presque-flotte au dessus des tâches de sang, notant comme l'écarlate n'atteint pas ses vêtements.
l'Alice retourne vers la porte Moon reste sur son passage
« Tu as donc si peur ? » sourit le passeur, penchant la tête sur le côté
Toujours entre la porte et l'Alice, Moon l'étudie d'un oeil curieux. Il n'a pas eu l'air très surpris de ne trouver que la mort derrière cette porte et personne ne semble bouger, pourquoi s'enfuir ? Par peur ou par dégoût, Moon ne voit que ça. (mais ses raisonnements sont ce qu'ils sont) Alors pour tester son hypothèse, il s'interpose, attendant de voir les résultats qu'il obtiendra. C'est qu'il est curieux, maintenant. Ce serait dommage d'amener un dangereux bouffon à Pétra sans savoir exactement ce dont il est capable.
« Ils ne bougent plus, pourtant, je pense que tu ne risques rien. » ajoute-t-il
A moins qu'ils puissent revenir à la vie comme les Otherlands le font à tous sauf les passeurs. Il semblait pourtant à Moon que ça ne se faisait pas, dans le monde des Alices..
Pour passer le contrôle à la frontière, Lucas s’était drapé avec ce qu’il aurait voulu être de l’indifférence. Mais sur le tracé de son chemin s’était placé l’inspecteur en posant une question, ou plutôt le menaçant en riant.
— Tu as donc si peur ?
Une dose d’adrénaline grimpa sur sa nuque. Lucas ralentit alors que son corps se préparait à courir. Ce n’était pas comme si il pouvait simplement le contourner. S’il se faisait scruter, il rendait la pareille. Il cherchait quelque chose, ou son absence.
Et Sailor Moon poursuivait, le moquait, insinuait un doute absurde.
Abus de conscience, de confiance en ces choses dont on ne peut douter comme en on fait l'expérience : cette puanteur cadavérique soudainement apparue, les insectes qui n'auraient pas dû être déjà là, ce brouillard qui l’aveuglait.
Un pressentiment malsain pesait dans son dos, mélange du cadavre et de la menace de la porte. La paranoïa lui conseillait de se retourner, mais il chassa l'idée, de peur qu'à trop l'envisager la peur s'exaucerait. Comme dans un cauchemar où le moindre doute se réalise, une pensée de trop lèverait le mort, un regard le placerait à portée de frayeur. Il aurait presque pu entendre les asticots grouiller.
Deux pas impulsifs chassèrent pour de bon la prophétie, cherchant à contourner l'intrus qui ne faisait que s'interposer.
Sa lame appuya dans le flanc du gêneur, avec assez de tact pour convaincre que c’était sa dernière semonce.
— Dégage.
Sa voix grave et impérieuse, ses dents s’entrouvrant à peine pour cracher la menace. Il n’y avait plus de peur dans son hostilité, l’adrénaline aux manettes, mais de l’urgence, de la précipitation. S’il fallait il planterait, remonterait l’agonie sous ses côtes, le bousculerait et fuirait. Même si dans les replis de ses vêtements il n’avait pas aperçu d’arme, il ne laisserait pas la place au doute.
