with a sword for a tongue & a shield for a heart • swords • END

Swords est de nacre et d'acier. Une robuste structure parée de jolis accents irisés. On la croirait danseuse si elle portait un autre nom, avec sa musculature développée mais toujours svelte. Elancée. Swords est une belle lame. Droite, tête haute et manières élégantes, elle n’a pas gardé que le domaine de ses nobles parents. Chevelure opaline et iris carmins, elle enlève au blanc son aspect fade.

sur elle, le blanc est pur
sur elle, le blanc est divin

elle n’hésite pas à en jouer

Fausse oracle décemment convaincante, Swords sait faire des mystères. Sait perdre son regard acéré dans un soudain vague; papillonner de ses cils blancs comme si elle revenait tout juste en ce monde. Ses mains délicates hésitent tous les instants nécessaires au dessus des cartes scellant votre fortune. Elle étire ses lèvres roses en un sourire indéchiffrable et vous parle juste au dessus d’un murmure.

Son oeil manquant est le clou du spectacle. A sa place, une fleur aux allures de lys. Cinq pétales doux au toucher, rosés en leur coeur, comme s’ils se gorgeaient de son sang. Juste assez étonnant pour ne pas répugner. Un artifice qu’elle remplace par un cache-oeil plus classique une fois la séance terminée, mais nul n’a besoin de le savoir.

Swords aime tirer les cartes
c’est un petit jeu amusant
ça lui donne l’air innocent

Pourtant, une fois sortie de ses amples tenues ivoire et or, celles qui flottent à chacun de ses pas, Swords ne peut plus se cacher. Ni les blêmes cicatrices ni les courbes de son corps.

un peu plus femme
un peu moins sibylle

un peu moins brebis
un peu plus louve

Swords n’est pas une oracle. Si elle pratique moins qu’auparavant, elle reste une escrimeuse de talent. A défaut d’être restées calleuses, ses mains portent nombre de cicatrices rugueuses au toucher. Swords se vêt alors pour la liberté de mouvements, ni riches tissus ni flottements esthétiques. Ses cheveux sont attachés, son bras gauche dans un gantelet lui servant de bouclier. Elle manie l’épée avec aisance et délices: combattre l’a toujours enivrée. Affrontez-la pour voir un tout autre sourire.

pas celui de l’oracle lilial et de ses mystères
celui de l’épée Vorpal, vainqueure du Jabberwocky

tell me more:

 Les épées sont des cartes d’air et Swords ne fait pas exception. Swords est libre, parait-il. Libre et mouvante, insatisfaite dès qu’il faut rester statique, elle n’est pas plus avec vous qu’elle est avec une autre. Son esprit vole d’un sujet au suivant avec une déconcertante adresse. Elle comprend vite. Réagit vite. Tient la conversation et l’amène ailleurs, regarde curieusement votre esprit se déployer. Vous êtes si passionnants. De nature extravertie, elle papillonne d’une compagnie à une autre sans quitter son joli sourire. Doux, lumineux.. sincère ? Peut-être pas.

Swords sourit par habitude
tellement plus que par joie

Swords aime qu’on réagisse, ça retient son attention. Rallume son esprit. (repousse le vide) La confrontation l’amuse, plaisir sauvage et parfois cruel qu’elle a trop souvent laissé l’emporter. Mais oh, comme elle ne s’en lasse pas. Elle est incorrigible. Les épées ne sont l'ordre que dans un sens.

Swords sait se montrer rationnelle
mais comme le chaos est enivrant

De la caresse d’une brise, elle peut passer à la morsure d’une tempête, emportée par son envie de voir ce que vous valez. Ce qu’elle vaut elle. Jusqu’où elle peut vous pousser. Alors vous pourrez être sûrs que son sourire est vrai. Sauvage, tout en crocs, mais ô-combien sincère. Fait rare. Swords est quelqu’un de méfiant. Pour toute son extraversion, elle prend bien plus qu’elle ne donne, accepte plus qu’elle n’autorise et cache plus qu’elle ne montre. Swords garde jalousement ce qu’elle a d’authentique. Elle est à elle et personne d’autre.

la compassion la rebute
la curiosité la rend agressive
(la douceur, quand à elle, la déstabilise)

(Swords est vide et Swords est amère. Swords est coupable parce qu’elle ne pardonne à personne et surtout pas à elle-même. Swords est hantée comme le château de Lostland, mais elle se complaît parmi les fantômes. Vouloir « l’aider » est futile: elle ne croit pas aux bonnes intentions. Epargnez-lui des maux de tête, gardez vos mensonges et elle gardera son venin.)

Mais les fissures sont discrètes et le masque presque parfait. Facile à approcher, difficile à apprivoiser, Swords montre ce qu’elle veut bien qu’on voie, s’éclipse et manipule pour qu’on ne devine pas le reste. Elle ne vous laisse pas la connaitre (elle ne se laissera plus contrôler) et si vous insistez.. qui sait.

peut-être qu’elle vous soufflera
qu’elle vous est inconnue
que vous l’oublierez
qu’elle disparaitra

tell me more:

 

son sang est partout
rouge, rouge, rouge

Rouge dans ses cheveux, rouge sur ses dents, rouge dans ses bras et Vorpal ne respire presque pas. Vorpal tousse sur des mots qui n’ont pas voulu sortir, coincés dans sa gorge. Dans sa bouche. Sur sa langue de plomb. Derrière ses lèvres cousues par un pouvoir retourné contre elle. Vorpal pleure du sang à n’en plus finir, blessée aussi mais c’est tellement rien. Elle saignerait davantage si ça suffisait à tout annuler.

fol espoir
qu’elle est bête

L’épée lui glisse des mains et les larmes des yeux. Un cri de joie monte dans son dos mais elle n’entend que des sanglots. Des peines. Elle a essayé de s’arrêter. Conjurer le sort, arrêter la machine de mort, réécrire cette vérité écrite de sa propre main. Sans succès. (sans surprise) "La plume est plus forte que l’épée", comme cet adage lui semble maintenant cruel.

Jabberwocky est vaincu
elle a gagné leur duel
quelle victoire
quelle horreur
quel chagrin

A ce jour, Vorpal ne s’est pas pardonnée. Jabberwocky ne l’aurait pas fait non plus, à en croire son expression alors qu’il se vidait de son sang. (haine, haine, haine) Ca ne veut pas dire qu’elle n’a pas recommencé. Son pouvoir a peut-être échappé à son contrôle ce jour-là, mais s’en priver lors d’une guerre aurait été la pire des idioties. Au moins servait-il désormais aux rebelles et non plus au tyran.

Vorpal, épée du Roi Noir, lui tourne le dos

(son ami aurait-il approuvé ?)
(sans doute l’aurait-il traitée d’hypocrite)
(voilà qui ressemblerait bien à Jabberwocky)

Inutile de préciser à quel point la rébellion est sceptique. (elle a raison) Pourtant, à force de belles paroles et manipulations à leur avantage, l'épée finit par s’attirer leur faveur. Et perdre celle des siens. D’une fierté, son nom devient pour sa noble famille une tâche de traîtrise qu’il faut effacer à tout prix.

(ils croient avoir une chance)
(c’est vraiment adorable)

Vorpal devenu Swords est un fléau et ils s’en rendent comptent bien assez vite. La guerre les balaye avant qu’ils ne puissent jeter de la javel sur la souillure qu’est leur fille aînée, la laissant seule héritière. Ses parents se retournent dans leur tombe. Ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-même, selon Swords. S’ils ne voulaient pas lui laisser leur fortune, ils auraient mieux fait de la renier pour de vrai.

voilà où ça mène d’être sentimental, se dit-elle
(c’est ce qui les a perdu quand ils l’affrontaient)
(leurs émotions et pas son pouvoir: contre eux, elle n’a pas osé)

Leur domaine et possessions s’attachent peut-être à des souvenirs discutables, mais Swords ne crache pas dessus. Une fois le Roi Noir écarté, ils lui permettent de vivre plutôt confortablement. (les murmures de jugement la laissent de marbre) De regarder les Créateurs se succéder d’un oeil presque amusé. Mais les jeux de type ’tout le monde veut prendre sa place’ ne le divertissent qu’un temps et lorsque Robin Hood se décide à mettre de l’ordre dans tout ça, elle peut compter sur le soutien de l’épée.

(par ennui plus que par conviction)
(elle avait désespérément besoin d’action)

Comme les autres, elle vient puis s’en va. Le Féérique est amusant, son règne permettant à Swords d’oublier son passé militaire. De l’enterrer avec les autres et se reconstruire un peu. (les rêves sont toujours amers, mais ils s’estompent lentement) Si elle ne perd pas son amour pour l’escrime, elle s’établit plutôt en tant que devin, tirant les cartes à qui veut bien la payer.

(parfois elle ne fait que les interpréter)
(et parfois.. elle leur donne du pouvoir)

Elle ne change pas quand le royaume s’effondre, emporté par la disparition soudaine de l’Etranger. Elle ne part pas non plus. Ce n’est pas comme si elle pouvait se placer sous la coupe d'un autre Créateur, n’ayant pas d’âme à lui offrir.

au fond, ça lui va plutôt bien
Swords en a assez de la servitude