Le narrateur avait envie de respirer l’odeur de fleurs.
Et il s’en est senti absolument stupide. Au fond de son lit froid, à peine éveillé, suite de rêves bucoliques, il eut la sensation d’être entouré d’un parfum de rose. Seulement, maintenant que ses sens sont clairs, et que le rêve évanoui, Le Narrateur se rend compte qu’il ne se souvient pas de leur odeur.
Dans une autre vie, il aurait aimé être romantique. Être un des personnages de ses sitcoms. Qui ravissent les femmes et qui les connaissent si bien. Pouvoir gâter une demoiselle d’un beau bouquet de lys. Mais il n’est ni beau, ni drôle, ni même intéressant. Alors il n’a pas pris la peine de s’intéresser aux fleurs.
Toute la journée, il n’a cessé de penser au foutu parfum des roses. Incapable de faire quoi que ce soit d’autre, il s’est même surpris humer quelques cheveux de collègues.
Creep.
Parce que Le Narrateur ne se reconnaît plus, ou parce qu’il ne souhaite pas se prendre les foudres (bien méritées) d’une femme en colère, il prend le taureau par les cornes et décide d’aller trouver des roses.
Il pousse la porte d’une boutique de fleurs. La première qu’il trouve. Et tout de suite, ça le frappe.
Voilà. C’est ça.
La fraîcheur des soirées de printemps le frappe. Il est enveloppé par tous les arômes. Roses, lys, tulipes et jasmin. Un bouquet qui le saisit jusqu’au plus profond des tripes. Et il en reste stupide.
En fait, c’est beau comme odeur.
Il doit avoir l’air un peu ridicule, dans son costume sinistre, avec sa coupe de cheveux sinistre, et sa gueule sinistre, au milieu de ce décor de film. Mais il reste bête, et ne bouge pas, emporté dans un drôle de syndrome de Stendhal.