Oui, Duchesse a entendu que, oui, Duchesse sait que. Pas qu’il soit omniscient. Mais son oreille est attentive et -mais pourquoi donc ?- les gens l'aiment bien, lui confient facilement leurs petits bobos, les physiques, les de cœur. Alors, même si tout juste débarqué dans la cour de Death - Saint Castor qu’il est beau-, Duchesse commence déjà à connaître bons nombres de petits secrets. Il a entendu que, il sait que. Il utilise le tout à bon escient, promis. Un petit mot d’encouragement. Un petit cookie réservé. Une fleur cueillie. Le tout dans le plus grand des secrets. Car ça pourrait lui apporter de la reconnaissance -Pouah !- qu’il ne mérite pas. Lui, sa vie a été vernie, n’est-ce pas naturel de rendre cette chance au centuple ? -Bah si- Et puis, y’a sa réputation de dur à cuir à entretenir, vu ? Ne pas lui chercher de noises, à lui ou ses petits protégés, ou sinon… ! Bon, reconnaît-il, encore un peu perdu dans ce nouveau royaume, ça ne semble pas vraiment utile -voir complètement inutile-. C’est… de la prévention, disons -voilà, de la prévention-.
Bon, les petites attentions ont coïncidé avec son arrivée. Personne pour le remarquer, pas vrai ?
C’est dans une infirmerie des plus classiques qu’est aujourd’hui Duchesse, un livre sur la médecine devant les yeux, un stylo coincé entre son nez et ses lèvres. Un bureau de médecin aujourd’hui vide, des instruments de mesures ici et là, auscultation, machines qu’il ne connaît pas encore -mais un jour !- et dans une salle adjacente, quelques lits de repos aménagés, vierge aujourd’hui de toute présence. Une chance, pense Duchesse, les pattes posées sur un petit bureau qui lui a été alloué. S’il essaye d'apprendre des bases curatives au plus vite, il reconnaît encore ses lacunes -à savoir qu’il ne sait rien-. Et aucun médecin aujourd’hui. Juste lui et ses compagnons livres -ouais, personne n’a intérêt à se blesser, ou sinon...!-. Oh, il y met du cœur à apprendre, Duchesse. Du matin au soir, entre deux bouchées, entre deux préparations de panier repas pour les alités -jamais signées-, avant le coucher. De quoi fracasser sa cervelle. Même le soir, après ses excursions pour voir des plus jeunes rescapés, quand il se perd dans les couloirs avant de retrouver sa chambre, il lit encore, rentre dans des gens qui, gentiment, le poussent vers le bon chemin sans qu’il ne s’en rendent vraiment compte. Un petit manège qui dure jusqu’à ce qu’il rentre nez le premier contre sa porte de chambre.
Une chance pour sa réputation de gros dur -qu’il pense avoir- que personne ne le remarque.
Pas facile d’être infirmier. Ça non. Car c’est ça qu’il est : infirmier. Pas nounou. Ni maman poule - Car, oui, il les entends aussi ces bruits de couloirs, oui-.
Hum.
Est-ce qu’il a bien donné les paniers repas aujourd’hui ? Détachant enfin son regard de son livre - dire qu’il n’a même pas atteint la lettre B des afflictions possibles-, il s’autorise un instant pour penser. Le vieux, check. La tata, Check. La Ballerine, Check. Mère Michelle, chats et chiens errants, check check check. C’est que ça doit être bon.
Il reprend sa lecture, se balançant dangereusement en équilibre sur sa chaise -et sur sa chance-. De quoi tomber si quelqu’un entrait. Et quelqu’un entre. Et il tombe.
