- Contexte:
Kobe High School a un contexte à tendance réaliste school life qui se passe au Japon, en 2018, dans la ville de Kobe. Le lycée et l'université (situés sur le même campus) sont de renommée internationale, la culture japonaise se mêle donc aux cultures des autres pays via les différentes nationalités présentes sur le campus. Le slogan de l'université de Kobe ? Faire naître le meilleur en chacun de nous !
- Personnage:
Seito Mori est un japonais de 18 ans. Il est actuellement en 2ème année au lycée. Redoublant, il est arrivé à Kobe High School après un renvoi de son ancien lycée. Le motif ? Des bêtises en pagaille, de l'insolence et pour finir un arrêt pur et simple de faire des efforts et donc de travailler. La raison ? Sa sœur, qu'il appelle la Chose. 5 ans qu'il rumine sa naissance, la considérant comme une vile trahison de ses parents. Persuadé que ses parents ne l'aiment plus et ont souhaité le remplacer, il s'est construit sur cette haine et ne cesse d'en éprouver les répercussions. Pour s'en protéger, il s'est réfugié dans les livres et la bibliothèque est sa seconde maison.
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C'est lui ?—
Sans aucun doute, inspecteur.—
Fais chier, grogne le cinquantenaire.
On en est à combien ?—
Impossible à quantifier.Ses lèvres s'affinent pour ne plus être qu'une ligne lui barrant le bas du visage. L’anxiété tapisse le fond de son regard alors qu'il baisse la tête vers le corps.
—
Identité de la victime ?Le légiste est si concentré que, l'espace d'une seconde, l'inspecteur croit ne pas avoir été entendu. Sa main gantée relâche la paupière rigide pour attraper un porte-feuille qu'il tend au policier.
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Mori Seito, 18 ans. La flèche a perforé le thorax pour se loger en plein cœur. Il est mort sur le coup.—
Vous confirmez le mode opératoire similaire ?Le plastique claque tandis que le médecin ôte ses gants l'un après l'autre après s'être redressé. Deux billes noires se braquent alors sur l'inspecteur. La gravité de la question impose un silence immédiat.
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Nous avons un serial killer dans la nature, inspecteur.Un frisson s'empare de l'assistance. Le pinceau relevé, le scellé entrouvert, l'horreur s'imprime sous la forme d'un flash qui aveugle le policier. Il sursaute.
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Bordel, Ueno-san, virez-moi cet appareil photo de là !—
P-pardon, inspecteur ! s'excuse aussi sec le maigrichon à lunettes.
Son agacement est de courte durée. Le policier soupire et tourne un regard fatigué sur ses subalternes.
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Parlez-moi de la victime.Les gratte-papiers s'ébrouent, le froissement de leurs carnets murmurant les détails d'une vie brutalement arrachée auxquels Seito assiste, les yeux grands ouverts.
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Lycéen, en deuxième année sur ce campus.—
Deuxième année seulement ?—
Il a redoublé. Des problèmes d'autorité. On le décrit comme turbulent et provocateur.Serait-ce le mobile du crime ? Une farce qui aurait mal tourné ? Le dessert restant que les deux adolescents convoitaient ? Une flèche en plein cœur n'a pourtant rien d'anodin.
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Sa famille ?—
Une sœur de 5 ans. Des agents sont en route pour annoncer la nouvelle à ses parents.—
Bien. Des amis ?—
Le Lidec Nolan et Mora Pablo. Le dernier est assis au fond de la cafétéria, précise-t-il d'un mouvement de menton.
Il se tenait à quelques centimètres de la victime au moment des faits.L'inspecteur détourne brièvement le regard vers le lycéen dont les cheveux violets ne manquent pas d'attirer l'attention.
—
Plus tard. On en est où de la balistique ?Un expert s'avance, tenant entre ses mains un échantillon de l'arme du crime. Un œil hâtif ferait le constat d'une flèche ordinaire, bien que peinte en rouge. Mais c'est avec une fascination malsaine que le groupe se penche sur l'objet de toutes les interrogations.
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Même flèche ?—
Reconnaissable entre mille.Une pointe en forme de cœur, tu m'étonnes.—
Ce n'est pas une imitation ?—
La même flèche que pour tous les autres, Chef, je suis formel.Le ton employé par l'agent dépasse la simple politesse inhérente à son rang. Il n'est pas dupe. Cette affaire remuait les tripes de tous ceux qui croisaient son chemin et, dans chaque regard qu'il accrochait, se terrait la même angoisse : serai-je le prochain à tomber ?
—
Même en l'ayant anticipé, je suis toujours autant...—
Sidéré ?—
Déconcerté, tranche l'inspecteur.
Un nombre de victimes qui ne cesse de s'accroître, des témoignages tous plus ténébreux les uns que les autres. Sans mentionner le fait que le tueur ne se soucie d'aucune temporalité. Jour et nuit, il sévit et encore personne n'a su nous en décrire ne serait-ce qu'un semblant de silhouette.Sous la cornée du mort se dessine un garçon aux traits hispaniques. Le reflet de ses cheveux entache ses orbites éteintes d'une couleur violacée. Mais plus personne ne semble remarquer Seito.
—
Vous en avez fini avec le témoin principal ?—
Oui, inspecteur. Vous pouvez aller lui parler.Le policier hoche la tête puis donne des ordres supplémentaires à son équipe avant de délaisser le corps sans vie. A mesure qu'il se rapproche, il constate l'attitude défensive du lycéen. Alors qu'il s'assoit, le cinquantenaire coupe court aux protestations.
—
Mora-san, c'est bien ça ?—
J'ai rien fait, inspecteur ! J'suis innocent ! J'étais là tranquille et– —
Personne ne t'accuse de rien.—
Mais l'autre il a dit qu'j'allais avoir besoin d'un avocat. Si ça veut pas dire qu'on croit que j'suis coupable ça !L'inspecteur passe une main fatiguée sur son front, se massant brièvement les paupières. Quant à Seito, il aurait bien envie de rire mais la mort a ses tracas qu'elle refroidit le moindre éclat.
—
Viens-en aux faits mon garçon. Qu'est-ce que tu as vu ?—
On était en train de se prendre à manger quand d'un seul coup, il s'est figé. On aurait dit qu'il avait vu un fantôme. J'vous jure, il me regardait avec des yeux immenses. Et sans prévenir, la flèche est sortie de nulle part et s'est plantée dans sa poitrine. Il s'est effondré sur le sol, j'ai rien pu faire.—
Quand tu dis qu'il s'est figé, c'est par rapport à quelque chose que tu lui as dit ?—
Je sais plus, je le remerciais pour m'avoir aidé en littérature. Et j'lui ai dit un truc du genre « Qu'est-ce que j'ferais sans toi ? ».S'il pouvait mourir à nouveau, Seito embrasserait la Faucheuse avec une ardeur redoublée. Il reproduirait la moindre de ses erreurs dans le seul but de ressentir à nouveau cette anomalie sensorielle. Ce trépignement incongru d'un cœur qui s'oublie, le temps d'un regard, farouchement condamné par un tueur ailé à qui l'arc démange.
—
Tu étais sincère ?—
Bah ouais, il est cool Mori en vrai !Au tour du détective de marquer un temps d'arrêt.
Non, c'est impossible...—
Inspecteur ! crie son second.
—
Je dois te laisser. Si j'ai d'autres questions, je–—
Vous me recontacterez, je sais.Foutu jeune. Soulevant sa carcasse exténuée, il se laisse accoster par le visage sombre de son partenaire.
—
On a deux nouvelles victimes, chef.—
Laisse-moi deviner. Une flèche en plein cœur ?—
Oui, mais–—
Ils s'échangeaient des œillades, riaient à la moindre blague, se souriaient comme des bêtas, s'effleuraient sans qu'aucun n'ose réellement se toucher ? Est-ce qu'ils avaient coutume de manger ensemble, de se promener ensemble, d'inventer la moindre excuse pour ne jamais avoir à être séparés ne serait-ce qu'une heure ?—
Comment–—
L'adolescence, la cible idéale...—
Inspecteur, je ne vous suis pas.Je deviens vieux.—
Rassemble les hommes, je sais qui est le tueur. Ou devrais-je dire quoi.—
Inspecteur ?Son second comprend l'urgence de la situation et n'insiste pas. Les vingt minutes suivantes sont un calvaire. Muet comme une tombe, Seito craint le verdict. Il se conforte dans l'assurance que la mort ne trahira pas sa respiration saccadée. Les murmures s'essoufflent dès lors que l'inspecteur entre en scène. Campé au milieu du cercle, il pose un regard désolé sur le corps du lycéen.
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Chers collègues, je ne serais pas parvenu à cette conclusion sans votre aide. Et il me chagrine de le dire, sans votre parfaite imperméabilité à ce que je m'apprête à vous dévoiler.Le visage de Seito pâlit tandis que l'incompréhension s'empare de l'auditoire. Réinstaurant le silence d'un raclement de gorge, le cinquantenaire s'explique.
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Voyez-vous, je me suis maintes fois questionné sur notre survie. En quoi n'étions-nous pas attrayants pour le tueur ? Femmes, hommes, adultes comme adolescents, parfois même des enfants, le tueur tue sans relâche. Alors qu'en est-il de nous ?La migraine bombarde sa boîte crânienne en silence.
Et si leur souhait était de mourir une fois la conclusion tombée ?—
Le tueur n'est pas humain. Ni même monstrueux. Il attend son heure en chacun de nous. Au détour d'un couloir, sur le siège d'un autobus ou même dans la file d'une cafétéria.—
Inspecteur, de quoi parlez-vous ? le coupe le photographe dissident.
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De l'amour, Ueno-san, de l'amour...Le japonais avait d'abord cru que Pablo lui avait gâché la vie mais, soudain, il comprend que l'espagnol venait de le sauver. En cela, Seito lui dédiait sa plus belle mort.