Cadavre exquis - Death

On te croit éphémère, ineffable d'émotions, bien trop solitaire pour pareilles intentions. Pourtant tu rêve en grand d'une vie de couleur, riche, ensoleillée loin de toute rancoeur. Tu n'en possèdes guère, mais tu la suscite trop. Bien trop pour tes épaules sur lesquelles glissent les mots.

Toutefois, même soucieux, il t'arrive d'oublier, de laisser libre court au fil de tes pensées faisant fi des enjeux. Tu le comprends trop tard, ce manège d'impressions, tu cherches à rectifier ta mauvaise attention, mais tu es peu bavard. On te prête parole, dissèque ta réflexion, à défaut de ta voix on se fait conviction de quelques idées loin de tes aspirations. il suffirait de peu pour calmer leurs tourments, pour délier les nœuds, souffler les chuchotements. On te réclame limpide, plutôt que d'éloquence, mais tu confonds les deux et te fais de carence. Chacune de ces bévues t'endette de jugements, tu as beau t'amender, tu restes ambivalent.

C'est ta façon à toi d'être intéressé, de faire comprendre ce choix de ne rien délaisser. Le monde est une constante dont tu chéris l'expansion, tant il n'y a de limite à s'armer de passions. Des tous petits tracas aux profonds ravissements, tes joies, tes peines sont tels que tout est exaltant. C'est pour ce grand frisson que tu aimes tant la vie, que tu poursuis, patient, de ton cœur étourdi là où te mène l'ennui comme le plus grand des bonds.

Dans ton éternité les couleurs resplendissent. Dans leur monotonie, les valeurs se ternissent.  L'empreinte demeure lorsque l'esprit évanescent ne délave pas les nuances. Toute d'élégance, toi le murmure mortifère tu insistes à leur existence passagère, leur insuffle en vain la force de chaque pigment. Elle est inestimable, cette essence émérite aux mystères redoutés. Elle est irremplaçable à tes yeux d'immortel, illustre et réputé. La vie est un cadeau pour les mortels qui se fanent, malheureux dans leurs âmes, négligeant leurs crédo.

On te méprise à tort, ignorant les soupçons qu'au-delà de ton corps on entende les pulsions. Le tambour sous l'ivoire n'est pas tant d'exception qu'on voudrait bien le croire, mais par dénégation on réfute ce savoir.

Résumé:

On t’imagine éthéré, dans un voile de fumée d’ébène, ton visage indiscernable pour ceux qui se risqueraient à le confronter. On te prête les traits décharnés d’un ivoire terne, squelette animé d’une volonté insatiable arrachant de ses phalanges affilées les âmes misérables des moribonds. Insoupçonnés, en la noirceur de tes cavités scintillent deux lueurs lilas qui reflètent bien peu d’émotions pour qui ne sauraient les deviner. Tu es cette entité dépeinte comme la faucheuse, munie de tissus volatiles aux pas de velours. Tu voudrais répandre un souffle tant unique qu’éphémère et ne sèmes que les oraisons funestes en le leur soustrayant.  

Tes caresses vaporeuses sont accusées à tort, les souffles retenus témoignent de la terreur que ces frêles tendresses inspirent à ta venue. L'épouvante est synonyme de l'aura pressentie lorsque de velours tes pas sonnent le glas présumé à ta proximité.  Tu la voudrais cordiale à minima, feutrant de ton manteau l'écho de leurs chagrin, protégeant les vivants des pertes de leurs prochains. Tu ne la contrôles pas cette essence colorée qui parfois t'es de glace et d'autre de chaleur, telle qu'on la perçoit elle convient à autrui sans te seoir, jamais.

Tout de cauchemar vêtu, on ne te soupçonne guère d'être autrement charnu sous les lambeaux funèbres. Dépassant des haillons, les fils d'argent s'évadent couvrant le chaperon de son tissage nacre jusqu'au creux de ton dos.

Nimbant ton visage esquissé dans le marbre, l'indicible émotion rend compte du mirage. On te jurerait mortel, poison qui de tout temps marque la fin d'un règne ou de l'insignifiant. Tu es fait de mystères, d'absence et d'inconfort, pourtant de ton énigme suscite les rapports. En dépit du lilas par lequel tes iris trahissent ta nature, lorsque ta peau diaphane te sert de parure, tu n'es guère plus qu'un homme. Tu ne te définis sous aucun prétexte et laisse le soin à ceux que cela intéresse d'apposer sur ton âme une nouvelle étiquette. Tu en portes tellement qu'elles ne te dérangent plus, en affectionne certaines.

Le silence n'est plus d'or et les regards posés ne sont plus d'hostilité. Tu as ta place désormais dans ce monde ou l'étrange à ses limites. Par égard, tu effleure toujours de tes doigts une épaule, une main léguant à qui voudra de ta bienfaisance. Pareille à ton aura, ta chaleur oscille de la fraîche brûlure au réconfort tépide. Tu voudrais déborder d'une énergie nouvelle, de celle qui communique les émotions partielles qui sur ton doux perdent de leurs sens. On te concède ce charme d'être au moins fascinant à défaut d'extraversion faire don de ta présence.

Résumé: