Épreuve 4 || Black&White - Esquisse

Explication forum et personnage:

Quand même la plus sénile des grand mères a l'air suspicieuse, c'est que y'a rien qui va.

— Ecoute, mon petit. Corrige au moins les fautes d’orthographe.
— Ssssss, ccccce ssssserait une grave erreur, les fautes servent à éloigner les mauvais essssprits…
— Et arrête de faire des croche-pattes aux gens pour leur faire croire qu’ils ont été attaqués par un esprit à trois mètres de ton stand.

Dylan essaie bien de lui expliquer que l’esprit avait pris possession de son corps aussi, mais bon ça marche pas trop.

— Ouais bah vas’y barre-toi tu verras quand le fantôme aura attaqué ta famille ! Moi j’essaie d’être sympa et d’aider les gens, et juste parce que chui un peu maladroit à l’écrit on m’croit pas, fffffh…

Au cas où vous commenceriez à le prendre en pitié, je reprécise : Dylan était totalement en train d’essayer de l’arnaquer. Elle et tous ceux qu'il a croisé depuis ce matin.
En vrai, vu les méthodes, si y’en a un qui va s’faire du blé, c’est surtout le médecin au coin de la rue. Si j’étais pas qu’un narrateur dans sa tête, j’ouvrirais ma clinique juste à côté. Je mettrais juste une blouse blanche et le truc pour entendre le coeur là, et hoplà. Alors que là, Dylan, pour s’improviser marabout, il a dû se trouver une tenue de méchant de Star Wars, se peindre des “runes mystiques” au rouge à lèvres, s’entraîner à parler comme un sssserpent (non parce qu’en vrai, il parle normalement hein) et acheter des objets flippants pour alimenter son… stand de limonade fait avec trois planches en bois. Sans parler de la pancarte quoi.

En gros, faudrait vraiment être sacrément défoncé, ou parfaitement aveugle pour avaler ne serait-ce qu’une goutte de ce que raconte Dylan. Et comme il m'entend pas, je peux même pas lui donner mes conseils avisés.

— Attensssssion !
Ah bah, pendant que je parlais, Dylan a trouvé une nouvelle cible. Cette fois, il a sorti le pistolet à eau que tout voyant garde sous son comptoir et l’a copieusement arrosée, seulement pour se précipiter à sa rescousse.
— Vous allez bien, m’dame ?

J’le redis : faudrait vraiment être sacrément défoncé, ou parfaitement aveu…

Oh.

Attends…

Qui porterait des lunettes comme ça de jour et se baladerait avec une canne, à part un miraud ?

— J’ai accouru car j’ai ssssenti une grande tensssssion ssssspirituelle iccci, mais j’ai sssssstoppé l’attaque jussssste à temps… Enfin presssssque…

Il lui tend une serviette pour qu’elle s’essuie les tifs. C’est pas exactement de l’eau qu’elle a dessus d’ailleurs, mais un genre de mélange dégueu que Dylan a fait avec des produits au pif. Selon son inspiration du moment, ça peut être un résidu d’ectoplasme, un démon qui a pissé sur sa victime ou les prémisses d’un cancer. En tout cas ça pue tellement que ça peut être les trois à la fois j’vous promets.

— Hmm… Cccc’est plus grave que cccce que je croyais…

Là, il pose sa patte de lézard aux longs doigts écaillés sur sa petite main. Y doit se dire que comme ça, elle aura vraiment l’impression qu’une créature surnaturelle est en train de lui causer. Utile pour introduire le speech marketing.

— Comme tous les reptiliens qui forment mon essssspèce, je dissspose d’un troisième oeil. Je perççççois l’aura des gens, mais aussssi les essssprits et les ssssortilèges.
Bon j’pense qu’à ce stade c’est assez clair, Dylan a certes un troisième oeil, mais à part la luminosité ça capte pas grand chose hein.
— Ssssssi je peux m’permettre de vous mettre en garde… Sssssur vos épaules, je vois quelque chose de très sssssinisssstre. Vous vous êtes sssentie fatiguée par moments ?

Comme à peu près tout le monde j’pense qu’elle s’est déjà sentie fatiguée ouais. Enfin apparemment la technique marche, et puisqu’il sent sa pigeonne réceptif, Dylan l’invite à l’accompagner jusque dans la ruelle d’à côté, où il lui décrit plus en détails le démon qui a décidé de la maudire.

— Je voisss… Une vieille dame à la peau sssssombre… Très puisssssante… Elle vous susssurre “Pourquoi ne m’as-tu pas écoutéééé…”..

Après lui avoir décrit la cliente précédente histoire de se venger, il lui improvise toute une histoire, impliquant un gros conflit magique et tout, puis il lui propose d’apposer un sceau qui bloquera provisoirement les mauvaises influences. Sceau qui utilise un objet de valeur pour canaliser l’attention de la démone et que Dylan doit aller enterrer dans un lieu très secret (son placard). Une fois qu’elle est passée à la caisse, il lui prodigue un soin spirituel, et là y s'met à danser autour d’elle en marmonnant en latin et en la saupoudrant de sel et de poivre. Puis la laisse partir, avec le conseil de revenir au moindre signe de fatigue ou de stress pour un rituel plus puissant, car il existe une chance que la démone qui en a après elle s’aperçoive de l’interférence et redouble d’effort, un truc du genre.

Et hop, premier client du jour.

Après avoir précieusement rangé son butin, Dylan se remet à son stand, bien déterminé à devenir le plus grand marabout du quartier en deux-deux. Il recharge son pistolet, et bim, il vise le premier type qui passe dans son champ de vision, cette fois au niveau des pieds pour le faire glisser.

Manque de bol, le mec est pas miraud, lui, et trois secondes plus tard c’est Dylan qui se retrouve à fuir comme s’il était poursuivi par le diable.

— Ouais bah t’façon il était nul ce quartier, jvais refaire mon business ailleurs.

Le lendemain, il s’installe comme le dernier des clodos dans un marché, et profite de pouvoir ramper sous les étals plus vite que son ombre pour perfectionner ses  croche-pattes. Il réussit comme ça à arnaquer un gamin dont il pique le jouet préféré, une peluche toute niquée qu’il utilise aussitôt dans une séance de vaudou improvisée à défaut d’pouvoir la revendre.

Bon ça s’passe pas méga bien.

Enfin, ça s’passe, c’est ça qui est étrange. Mais pas sur la personne à vaudouiser quoi.

Genre à chaque fois que Dylan plante un clou dans la peluche, c’est le client qui se prend un truc dans la face. Alors certes, ça le rend super crédible en tant que mage noir, mais ça fait surtout échouer sa vente.

À partir de là, le doudou volé est évidement devenu son outil de travail principal. J’aimerais vous dire que moi j’l’aurais jeté dans une poubelle (et me s’rais demandé ce que foutait un gamin avec) mais j’avoue que le potentiel de chaos avec ce truc en main est démentiel. Pour essayer de piger comment il marche, Dylan tente plusieurs trucs, genre regarder quelqu’un d’autre, utiliser autre chose que des clous, ou même causer à la peluche. Le plus spectaculaire qu’il réussit à faire, c’est attirer une nuée d’abeilles qui fait fuir les trois quidams qu’il essayait d’impressionner. Et faire tomber un géranium à deux centimètres de sa tête.

Là c’est p’têt toi qui aurait besoin d’un bon exorciste mon gars. J’dis ça, j’dis rien.

— Tsss, c’est le temps que ça vienne… se plaint un Dylan boursoufflé, crevé et fauché, assis au bord d’une impasse.

Heureusement, le p’tit est moins superstitieux que capitaliste : quitte à être possédé, autant en faire aussi un business. Il dessine à l’arrache quelques affiches pour inviter la populace au rituel de sa propre purification, sur un grand rond-point desséché dont il a entendu parler la veille, à un tarif attractif pour toute la famille. Quand une belle foule de curieux s’est massée autour de son pentacle improvisé, le lézard encapuchonné marche lentement vers le centre.

—J’ai longtemps chassssssé les démons et malédictions, mais depuis peu, il sssss’en ssssssont pris directement à ma persssssonne, pour me réduire au sssssilence…
Il sort son sceptre, une croix faite de bouts de bois vaguement scotchés ensemble, puis jette le doudou au sol et le piétine au rythme de son chant rituel.
— Lorem ipsssssum dolor sssssit amet, conssssectetur adipissss elit…
Il perce discrètement une poche de sauce tomate qu’il avait sur lui, puis fait mine de s’effondrer au sol et d’être attaqué par une entité surnaturelle. Franchement le p’tit a manqué une carrière dans le théâtre, il est doué pour le nawak en impro.
— Vivamussss non augue lectussss sagittissss… Vade retro…
En plus il a vraiment fait des efforts dans la préparation, parce que le sol grince et craquelle à mesure qu’il semble pris par la possession.

Attendez, le sol craquelle ?

— AaaaaaAAAAAaaah !

Les entrailles de la terre s’ouvrent, pour révéler un précipice où tombent Dylan, le doudou maléfique et l’argent du spectacle, droit dans le miasme qui les attendait juste en-dessous.

Arg, ça pue la mort ! C’est une putain de fosse septique !

Paniqué, Dylan se débat, s’en fout partout, même dans l’œil.

Il a juste le temps de voir une figure connue…

Le mot de la fin:

Présentation de Damned Town : :

Il est rare que nous devons nous aventurer hors de la ville. Et pourtant, comme toutes les règles possèdent leurs exceptions, celle-ci n’en est pas exemptée. Nous sommes sortie de notre Nocturne si cher à notre cœur. Nous nous aventurons en terres inconnues, et avec un peu de chance, ce périple ne sera pas en vain. Cela ne fait même pas une demi-journée que la stupidité des autres nous font déjà monter la moutarde au nez. Nous ne voulons créer d’esclandre et par conséquent nous prenons notre mal en patience. Il est plus difficile de ne pas remettre tous ces insectes à leur place chaque seconde qui passent. Le marché est le pire des endroit pour une telle situation, mais nous n’avons pas le choix que de le traverser, au risque sinon de perdre un temps précieux. Nous voulons en finir au plus vite et nous éloigner aussi rapidement que possible de cette masse grouillante de vermines appelée humanité. Nous nous empressons donc d’entamer, canne à la main, la traversée de cet enfer au pas de course.


Un jet visqueux d’une matière poisseuse vient se répandre sur notre poitrine. Nous étions si concentrée que nos pouvoirs ne l’ont même pas vu venir. Nous sommes maintenant affublée de vêtements inconfortables, humides, et l’odeur est absolument répugnante. Nous ne sommes certainement pas dans de bonnes prédispositions pour ce genre de contretemps. Il en est assez, nous ne savons pas encore qui est le ou la responsable, mais une chose est sûre, il va regretter le jour de sa naissance. C’est une torture que de résister à l’envie meurtrière qui s’empare de nous, il serait si simple de dégainer nos lames et partir en chasse, punir l’idiot derrière cet outrage envers notre personne. Nulle miséricorde ne le protégera aujourd’hui.


C’est la même voix que tout à l’heure, la voilà qui se rapproche de plus en plus pour nous « venir en aide ». La fausse pitié nous agace peut être encore plus qu’un méfait honteusement réalisé contre notre personne. Sa voix résonne de mensonge et d’intérêt, nous ne savons pas encore ce qu’il manigance mais une chose est certaine pour l’instant, ses intentions ne sont pas mue par l’altruisme.


Nous y sommes, une arnaque de bas étages fomentée par un esprit simple et stupide. Nous avons donc trouvé notre responsable. Il serait aisé que de le punir rapidement. Il ne suffirait que d’un geste rapide. Nous contenons un frissons de plaisir alors que nous songeons à la sensation de notre lame qui s’enfonce millimètre par millimètre dans la jugulaire de cet imbécile heureux qui ne manquerait à personne. L’odeur que nous dégageons à présent est une offense suffisante pour que nous le condamner à la peine capitale. Pourtant, même nous, nous devons le reconnaître, ce serait bien trop simple, il mérite de souffrir quelque peu avant de subir son châtiment.

Il parle encore mais nous ne l’écoutons plus. Nous sommes plus captivée par la patte écailleuse qui vient de se poser sur notre main. C’est assez inhabituel, mais une fois le contact physique crée nous voyons dans les limbes qui est cette personne. Très bien Dylan, il est temps que nous nous amusions ensemble. Vous vous prétendez devin, voyant ou encore spiritiste afin d’extorquer la monnaie sonnante et trébuchante des crédules et des ignares ? Il est temps que quelqu’un vous enseigne une leçon que vous n’êtes pas prêts d’oublier. Nous le laissons accomplir son délire de façade et le laissons même avec une breloque sans valeur afin qu’il se sente victorieux dans son entreprise. Les faibles d’esprit ont tendance à voir leur égo gonfler drastiquement à la moindre petite illusion de réussite. Nous comptons sur son imprudence pour le châtier. Nous allons nous cacher dans une ruelle dès que nous nous sentons hors de vue. Nul écho de pas nous entoure, alors nous grimpons sur les toits. Nous prenons hauteur et nous regagnons la place où notre proie semble être tombée dans le piège. L’araignée à encore capturée un moucherons. Il est temps de passer à table.

Il recommence d’abord une première fois. Nul besoin d’intervenir ici, la bêtise sans limite du lézard lui fit frapper un docker qui visiblement n’avait pas la même patience sadique que nous. Le baroudeur se mis à poursuivre la fraude, le chassant de sa tanière. Parfait, cela va le rendre plus vulnérable, songeons nous. Nous sautons de toit en toit, pourchassant l’insecte qui s’enfuit ventre à terre tel un rampant. Nous le laissons se croire en sécurité alors qu’il s’en va se cacher pour la nuit. Pendant ce temps, nous usons de notre pouvoir de voyance pour retracer le parcours du fraudeur qui aura lieu le lendemain. Nous retirons quelques clous, nous plaçons quelques bâtons, nous scions même une branche sur laquelle repose une ruche afin qu’elle cède au moment propice le lendemain. Nous créons toutes les circonstances qui feront que chaque tentative du rat pestiféré se retournerons contre lui. Nous en arrivons bientôt au plus compliqué, une fosse septique où cet imbécile tentera un Grand Final. Nous avons du mal à visualiser comment nous pouvons déstabiliser cet évènement. Nous analysons dès lors le terrain plus pragmatiquement. Après quelques tâtonnements et diverses résonances creuses. Nous arrivons à nous rendre compte que la surface en métal de la fosse est complètement rouillée et prête à céder, la seule chose qu’il manque, c’est du poids. Une quinzaine de personne pourrait faire chuter le haut. Cela nous donne une idée.

Le principal est maintenant fait, nous allons alors subtiliser ce qui nous intéressait en premier : du souffre. Il est compliqué de s’en procurer à Damned Town, pourtant essentiel pour les chimistes et divers forgerons en ont besoins pour la fabrication de balles pour les armes à feu, entre autres choses. Une fois le sac récupéré, nous allons à notre tour dormir dans une planque de contrebandier, près du port. Si notre vision est exacte personne ne devrait y aller avant plusieurs jours, parfait pour ne pas être dérangée. Au petit matin, nous nous réveillons afin de pouvoir retourner suivre notre escroc. Il est déjà prêt à reprendre ses méfait, mais comme nous l’avons anticipé, rien ne se passe comme il s’y attend. Ses clients tombent, se prennent des projectiles et diverses autres afflictions. Nous en profitons même pour faire tomber des pots de fleurs du haut des toit. Pas de chance ils les esquiva tous, pour notre plus grand déplaisir, mais tout suit le plan comme nous l’avons vu jusque ici.

Arrive enfin le moment du grand final, nous pouvons entendre à travers la frustration qu’il commence à s’exciter. Nous allons voir des marins, des familles, toutes personnes que nous pouvons trouver. Nous leurs assurons le spectacle le plus drôle qu’ils auront l’opportunité d’observer de leur existence. Le mot commence à passer dans la populace et quelques personnes se laissent séduire, suffisamment pour que la plaque de tôle puisse céder. C’est parfait, tout se met en place. Il commence sa « prise de possession » et le spectacle peut commencer. Le vacarme est tel que personne ne fait attention au grincement sinistre qui se dégage de la tôle au dessus de la fosse. Le reptile sait-il même sur quoi il se trouve ? Nous en doutons fortement, cela nous arrache d’ailleurs un sourire des plus vengeur. Fatalement ce qui devait se produire fatalement arrive. La fosse s’ouvre sous les pieds du fabulateur dans laquelle il plonge dans un bruit sonores aux assonances disgracieuse. Chacun cède de rire à son tour alors que le possédé se débat dans un ensemble de déjection et de rejets organiques à la provenance diverse. Tous s’en vont une fois la farce terminée, laissant le malheureux dans sa situation désastreuse.

C’est alors que nous choisissons de réapparaître, lui léguant alors ces dernières paroles.


Nous tournons alors le dos avant de repartir pour Damned Town, satisfaite.