we're but sunflowers in the rain • fleur • end

Fleur vient de la forêt. Elle a grandi sous le couvert des feuilles, entre brins d’herbe et pâquerettes. Moufette ordinaire (mis à part sa fourrure) à l’époque, Fleur trouvait tout à fait acceptable de manger insectes, petits rongeurs et baies tombées par terre. Elle courait dans les feuilles mortes avec ses nombreux frères et soeurs à l’automne et se blottissait dans un terrier quand venaient les neiges pour sommeiller au calme.

Fleur s’est beaucoup amusée. Avec les lapins comme avec les oiseaux, puis même un certain petit prince quand l’occasion se présentait. Fleur s’amusait beaucoup, sauf peut être lorsque des pas lourds comme la pierre martelaient le sol, souvent accompagnés de coups d’un tonnerre bien peu naturel.

l’air empestait la poudre
(parfois même le sang)

Si ces moments déplaisants n’ont longtemps pas suffi à entacher les belles journées de Fleur, les choses ont vite changé quand Lilas a disparu. Son frère le plus âgé, une moufette responsable et prudente qui l’aidait à surveiller les plus petits.. il ne serait pas parti sur un coup de tête. (il lui en aurait au moins parlé) ‘il reviendra’, lui a-t-on dit. Inutile de s’inquiéter.

alors pendant quelques temps
Fleur s’est contentée d'attendre

Puis ce fut le tour de Dahlia. De Lily. De Lavande. Toujours plus de frères et soeurs partis sans revenir, sans laisser ni un mot ni une touffe de poils. Les adultes pourraient répéter de ne pas s’en faire tout ce qu’ils voudraient, Fleur ne comptait plus se laisser faire. Alors avec d’autres animaux curieux, défiants ou désespérés, Fleur a cherché.

Fleur a arpenté chaque bosquet, fouiné sous chaque buisson, pointé son nez entre chaque racine qu’elle connaissant. Fleur a grimpé les arbres les moins hauts et reniflé d’aussi près qu’elle osait les mâchoires de métal parfois cachées dans l’herbe.

rien, toujours rien
rien jusqu’à l’incident

Un coup de tonnerre retentissant et des oiseaux s’envolant à tire d’aile. Cette fois-ci, Fleur n’a pas fui. (du moins, pas dans la bonne direction) Fleur a détalé vers l’horrible bruit, flanquée d’un lapin gris et d’une peur vorace.

Ce qui les accueillit fut une odeur métallique. Une odeur étouffante qui la prit à la gorge en même temps que le chagrin. Le petit prince et sa mère inerte emportés par un chasseur. (sans doute pour un voyage sans retour) Emportés loin des bois, des fleurs et des brins d’herbe.

emportés loin d’elle
comme tous ses frères et soeurs

Comme traversés du même éclair de folie, le lapin et elle ont perdu l’esprit. Que ce soit l’horreur de la scène ou la perte de trop, Fleur ne s’est pas arrêtée pour se poser la question. Elle a quitté les bois et ceux qui lui ont dit de fermer les yeux sur ces disparitions. (qui étaient sans doute des meurtres) Elle a quitté ses brins d’herbe, ses arbres et sa forêt. A l’extérieur, entre béton et bitume, le monde était plus dangereux encore qu’elle ne l’aurait imaginé.

Ni mâchoires de métal ni bâtons crachant le feu et la terreur, certes, mais les Deux Pattes étaient partout. Pas de terrier pour s’enfuir, pas d’arbres pour les égarer. Fleur et Panpan ont bien failli y rester ! Sans l’agilité de l’un et la maîtrise des odeurs de l’autre, les choses auraient été compliquées.

Ce n’est que plus tard, après un bref demi-tour, que Fleur a appris une méthode moins risquée. Moins.. visible, disons. En abandonnant sa fourrure, Fleur pouvait se faire l’une des leurs. Une Deux Pattes qui, même avec des oreilles et une queue de moufette, ne serait pas vue comme un nuisible à éliminer ou une fourrure à voler.  Aussi répugnée soit-elle d'emprunter l’apparence de l’un de ses tourmenteurs.. Fleur supposa ne pas avoir le choix. Même Panpan, à peu près aussi virulent qu’elle dans son dégoût pour les humains, avait adopté la méthode.

alors Fleur est devenue l’une des leurs
en surface, du moins

Depuis, Fleur a hélas passé davantage de temps sur deux pattes que sur quatre. Ayant suivi Panpan dans Mêmeland, elle s’est établie comme son assistante dans son travail de détective. Autant elle n’a que faire des histoires de couples des humains, autant elle sait que son ami aura besoin d’aide pour retrouver leurs semblables. La tâche est.. ardue. Intimidante. Peut-être n’y parviendront-ils pas tout de suite. (Et peut-être se mettront-ils encore en danger) Mais une chose est certaine: Fleur ne peut pas le laisser faire ça seul.

parmi tous ces meurtriers
il lui faudra au moins une alliée